Toutes les questions et réponses
Pour ce faire, il faudrait que la construction d’impulsion génétique pénètre et soit fonctionnelle dans les cellules germinales d’une espèce non apparentée. Il est attendu que l’évaluation des risques au cas par cas juge cette possibilité comme hautement improbable, car elle nécessiterait une série d’événements extrêmement improbables pour se produire. Néanmoins, la possibilité d’un tel « transfert horizontal de gènes » devrait être prise en compte dans l’évaluation des risques au cas par cas (voir les exemples ci-dessous). Pour plus d’informations :
https://malariajournal.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12936-021-03674-6
https://publications.csiro.au/rpr/download?pid=csiro:EP151689&dsid=DS2
Non. Contrairement à la Technique de l’Insecte Stérile (TIS), qui dépend de l’inondation de la population locale de moustiques cibles pour être efficace, les moustiques à impulsion génétique devraient être capables de s’établir et d’atteindre l’objectif fixé lorsqu’ils sont lâchés en plus petit nombre. Bien que la taille et la fréquence des lâchers puissent être plus importantes pour les approches d’impulsion génétique auto-limitatifs que pour les approches autonomes, dans les deux cas, les nombres ne seront pas aussi importants que ceux utilisés dans la TIS. Les mesures conventionnelles et les mesures de biocontrôle à l’aide de moustiques génétiquement modifiés se sont généralement concentrées sur des lâchers de mâles uniquement afin de minimiser les nuisances dues aux piqûres et le risque de transmission de maladies. Il est prévu que les lâchers de moustiques à impulsion génétique se déroulent dans des conditions similaires. Tout dommage potentiel qui pourrait être associé aux lâchers de moustiques mâles devrait être pris en compte dans l’évaluation des risques.
Les autorités réglementaires nationales détermineront les exigences en matière de surveillance dans le cadre du processus d’approbation du lâcher de moustiques à impulsion génétique, conformément aux lois et aux règlements d’application pertinents. En général, les risques potentiels associés aux activités proposées seront caractérisés au cours de l’évaluation des risques au cas par cas, avant le lâcher. Des informations pertinentes, telles que l’expérience antérieure avec des moustiques à impulsion génétique et autres moustiques génétiquement modifiés, ainsi que la connaissance de la biologie et du comportement de l’espèce de moustique, du ou des traits modifiés et de l’environnement récepteur (géographie, conditions météorologiques, utilisation des sols, environnement bâti, etc.), seront prises en compte dans la caractérisation des risques. Les autorités réglementaires fourniront une recommandation sur les risques acceptables et ceux qui doivent être gérés ou minimisés, ainsi que sur les stratégies à mettre en œuvre pour assurer cette gestion ou cette minimisation. Ces recommandations constitueront la base des termes de référence pour l’utilisation d’un produit de moustique à impulsion génétique approuvé. Une fois le produit approuvé et lâché, il sera nécessaire de surveiller l’efficacité et l’adéquation des mesures de gestion des risques. Ainsi, il est prévu que les exigences en matière de surveillance post-approbation se concentrent principalement sur les questions pour lesquelles il existe une incertitude concernant la sûreté et l’efficacité qui n’a pas été résolue au cours de l’évaluation des risques. Les critères d’évaluation, la fréquence et la durée de la surveillance pourraient être modifiés en fonction des données post-approbation permettant de résoudre l’incertitude subsistante.
Le Cadre d’Orientation de l’OMS pour l’Evaluation des Moustiques Génétiquement Modifiés prévoit un contrôle de l’efficacité et de la sûreté à chaque phase de l’évaluation, ainsi qu’une période de surveillance après la mise en œuvre, afin de s’assurer de l’efficacité et de la sureté dans des conditions opérationnelles, suite à une décision d’utiliser des moustiques à impulsion génétique en tant qu’outils de santé publique (voir également Comment les moustiques à impulsion génétique seront-ils testés ?). Le Cadre d’Orientation fournit des recommandations spécifiques sur les types de données qui peuvent être collectés à chaque phase. Pour plus d’informations : https://www.who.int/publications/i/item/9789240025233
Généralement, l’évaluation des risques fait appel à diverses sources de données et d’informations, en leur accordant des poids différents. Les données générées liées à l’organisme (espèce), à la modification (caractéristique modifiée) et à l’environnement récepteur, auront le poids le plus élevé. À ce jour, aucun organisme à impulsion génétique n’a été lâché dans l’environnement. Les données expérimentales issues d’essais en milieu confiné dans des cages de petite et de grande taille seront très instructives, de même que la connaissance de la biologie et du comportement dans la nature de l’insecte hôte, des impulsions génétiques naturelles connexes et de l’environnement dans lequel les insectes modifiés seront utilisés. Divers outils prédictifs, y compris la modélisation mathématique, peuvent fournir des indications sur certains aspects du comportement des insectes à impulsion génétique lors d’un lâcher, comme la manière dont le temps, la saisonnalité ou l’utilisation d’autres mesures de contrôle peuvent affecter leur propagation au sein de la population locale de l’organisme cible. Néanmoins, en l’absence initiale de données relatives à la performance sur le terrain des impulsions génétiques, l’évaluation des risques devra peut-être tenir compte d’une série d’incertitudes. Certaines d’entre elles peuvent être résolues par des méthodes spécifiques d’atténuation des risques et de suivi. Bien que plusieurs experts d’évaluation des risques ont indiqué que les cadres actuels d’évaluation des risques sont adaptés à l’évaluation des organismes à impulsion génétique, ils ont également relevé des domaines pour lesquels des orientations supplémentaires pourraient s’avérer utiles. Des travaux visant à fournir de telles orientations sont en cours dans plusieurs contextes, notamment la Convention sur la diversité biologique et l’Autorité européenne de sécurité des aliments. Ces orientations viendront s’ajouter aux lignes directrices existantes en matière d’évaluation des risques, acceptées au niveau international. Pour plus d’informations : https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1462901119311098 https://efsa.onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.2903/j.efsa.2020.6297 https://efsa.onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.2903/j.efsa.2020.6297 https://bch.cbd.int/protocol/risk_assessment/cp-ra-ahteg-2020-01-04-en-2.pdf https://www.nature.com/articles/s41467-023-37483-z https://www.liebertpub.com/doi/10.1089/vbz.2019.2606?url_ver=Z39.88-2003&rfr_id=ori%3Arid%3A crossref.org&rfr_dat=cr_pub++0pubmed https://malariajournal.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12936-022-04183-w https://efsa.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.2903/j.efsa.2017.4971
Bien qu’il existe des raisons éthiques et techniques majeures pour ne pas envisager l’utilisation de l’impulsion génétique chez l’homme, certains scientifiques ont avancé des hypothèses sur la manière dont l’impulsion génétique pourrait être utilisé pour empêcher une population d’animaux d’être infectée par des agents pathogènes qui pourraient les rendre malades et/ou être transmis à l’homme par la suite. Les animaux peuvent servir de « réservoir » pour certaines maladies, ce qui signifie que l’agent pathogène responsable de la maladie peut vivre, se développer et se multiplier dans l’animal. Selon le type d’agent pathogène, l’homme peut attraper la maladie soit directement à partir du réservoir animal (par une piqûre, l’ingestion de viande infectée ou l’interaction avec des excréments animaux contenant des agents pathogènes dans l’environnement), soit indirectement par l’intervention d’un vecteur, tel qu’un moustique ou une puce, qui transfère l’agent pathogène de l’animal à l’homme. L’impulsion génétique a été proposée en tant que moyen possible de propager un trait de résistance dans la population d’animaux cible, de manière analogue à l’immunisation ou à la « vaccination » des animaux contre l’agent pathogène. Cela permettrait à la fois de protéger l’animal et de réduire le risque d’exposition de l’homme à l’agent pathogène. Parmi les exemples d’utilisations proposées, on peut citer le développement de chauves-souris résistantes aux coronavirus ou de souris résistantes à la maladie de Lyme. Toutefois, ce concept est encore à un stade de développement très préliminaire.
Non. CRISPR (qui signifie Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeats) est une famille de séquences d’ADN, observées à l’origine chez les bactéries et dérivées de l’ADN viral lors de l’infection initiale. CRISPR agit comme un système de défense pour protéger ces cellules bactériennes lors d’invasions virales ultérieures. La séquence d’ADN CRISPR est transcrite dans la cellule bactérienne sous forme d’un ARN, qui sert de guide spécifique à une protéine associée à CRISPR (appelée nucléase Cas) qui clive l’acide nucléique viral dans une région complémentaire de la séquence CRISPR, désactivant ainsi le virus. Il existe une variété de types de CRISPR/Cas avec différentes capacités de reconnaissance de séquence et de clivage. Le système CRISPR-Cas a été adapté pour être utilisé comme outil de modification du génome en y substituant des séquences d’acides nucléiques guides spécifiquement construites qui indiquent à la protéine Cas de couper une séquence cible particulière dans l’ADN d’un organisme. Ce système s’est avéré très efficace dans de nombreux types de cellules et peut être utilisé pour ajouter, supprimer ou modifier la séquence d’un gène cible dans le génome d’un organisme. Les outils basés sur CRISPR/Cas sont en cours de développement en tant que thérapies pour plusieurs maladies génétiques. Ils sont également utilisés comme méthode pour développer des impulsions génétiques synthétiques.
L’impulsion génétique est un processus qui promeut ou favorise l’héritage de certains gènes d’une génération à l’autre. Depuis le début du 20e siècle, les scientifiques ont découvert plusieurs types d’éléments génétiques égoïstes présents naturellement dans les génomes de nombreuses espèces. Ces éléments génétiques naturels sont capables de favoriser leur propre transmission par rapport au reste des gènes du génome indépendamment du fait que leur présence soit neutre ou même nuisible à l’organisme individuel dans son ensemble – dans ce cas, on parle d’impulsion génétique naturelle.
Les exemples d’impulsions génétiques naturelles incluent les gènes d’endonucléase « homing » présents dans toutes les formes de vie microbienne, les éléments transposables présents dans de nombreuses plantes et de nombreux animaux, et la distorsion de ségrégation méiotiques, également présente dans diverses plantes et divers animaux.
Les impulsions génétiques synthétiques utilisent les techniques de la biotechnologie moléculaire moderne pour obtenir des effets similaires à ceux observés dans un plus grand nombre d’organismes avec les impulsions génétiques naturelles. Ainsi, les organismes porteurs d’impulsion génétique sont considérés comme génétiquement modifiés, bien que le mécanisme synthétique qu’ils portent puisse fonctionner de manière très comparable à une impulsion génétique naturelle. Les gènes synthétiques peuvent être utilisés pour introduire de nouvelles caractéristiques dans une population d’organismes, tels que les moustiques ou les souris, en l’espace de quelques générations seulement.
Un danger est une source potentielle de dommage ou d’effet nuisible pour quelque chose ou quelqu’un. Le risque est la probabilité d’un dommage dû à un danger particulier.
L’identification des dangers est une première étape de l’évaluation des risques, qui tente d’identifier de manière exhaustive toutes les caractéristiques ou conditions susceptibles d’entraîner un résultat négatif ou un dommage. Dans une étape ultérieure, la probabilité que ce dommage se produise dans certaines conditions définies et l’ampleur (la gravité) de ce dommage s’il se produit sont examinées ensemble pour déterminer le risque dû à ce danger. Ainsi, au cours de l’évaluation des risques, il est possible de déterminer qu’un danger identifié ne présente pas de risque significatif ou inacceptable.
Les moustiques à impulsion génétique sont un type de moustiques génétiquement modifiés. Dans les deux cas, les moustiques de l’espèce ciblée sont modifiés à l’aide de la biotechnologie moderne pour présenter un ou plusieurs traits différents des moustiques de type sauvage (non modifiés) de la même espèce. Un exemple de nouveau trait souhaitable serait une diminution de la capacité des moustiques modifiés à transmettre des maladies telles que le paludisme ou la dengue. Les modifications peuvent consister à changer la séquence des gènes existants, à désactiver ou à exciser des gènes existants ou à introduire de nouveaux gènes ou d’autres éléments génétiques dans le génome du moustique.
Lorsqu’il n’est pas couplé avec un système d’impulsion génétique, un gène (y compris toute modification génétique introduite) est généralement transmis à la progéniture par l’accouplement de moustiques modifiés avec des moustiques de type sauvage selon le modèle d’hérédité standard (Mendélien), où chaque gène a 50 % de chances d’être transmis par le parent à la génération suivante. Si le gène ou la modification génétique est associé à un coût d’adaptation (réduction de la compétitivité), le trait correspondant devrait disparaître de la population au fil du temps. Si le coût d’adaptation est important, le(s) gène(s) introduit(s) peut (peuvent) disparaître rapidement ; ce serait le cas, par exemple, si la modification entraînait une réduction de la fertilité chez les moustiques qui en étaient porteurs.
Lorsqu’elle est couplée avec une impulsion génétique, la modification génétique est héritée de manière préférentielle. Le nouveau trait associé finira par devenir dominant dans la population, car plus de 50% (parfois presque 100%) de la progéniture issue d’accouplements entre des moustiques à impulsion génétique et leurs homologues de type sauvage hérite de la modification.
Quand est-ce que les moustiques à impulsion génétique seront prêts à être testés et mis en œuvre ?
Nous ne connaissons pas encore la réponse à cette question, car elle dépend de nombreuses variables, y compris la clarification du processus réglementaire et la collecte des informations nécessaires pour soutenir l’évaluation des risques pour différents systèmes d’impulsion génétique et dans différents lieux.
Les études de phase 1 peuvent être menées en milieu confiné dans un laboratoire et des cages convenablement aménagés, tant que l’espèce de moustique concernée puisse y être maintenue. Toutes les études et tous les essais sur le terrain devront nécessairement être menés dans des environnements où l’espèce de moustique ciblée existe à l’état naturel. Les évaluations de la phase 3, qui mesurent la sureté et l’efficacité dans la réduction de la maladie, doivent être menés dans des zones où la maladie en question est activement transmise.
Cette question sera abordée dans le cadre de l’évaluation des risques (voir Comment gérer les risques ?). L’évaluation des risques tiendra compte des autres maladies pouvant être transmises par l’espèce de moustique cible qui sont présentes dans la région où les moustiques à impulsion génétique seront lâchés. Si cela s’avère nécessaire pour étayer l’évaluation des risques, des expérimentations peuvent être menées en laboratoire afin de mesurer la capacité des moustiques à impulsion génétique à transmettre différents agents pathogènes. Ces expérimentations consistent à nourrir artificiellement le moustique avec du sang contenant l’agent pathogène, à l’aide d’un dispositif d’alimentation à membrane, puis à examiner la capacité de l’agent pathogène à se développer dans le moustique et/ou à être éjecté dans la salive du moustique, comme cela pourrait se produire lors d’une piqûre.
Oui, en fonction du type d’impulsion génétique et de l’ampleur du lâcher. L’impulsion génétique ne cause pas et ne favorise pas la résistance aux insecticides. Des précautions sont prises pour ne pas introduire des modifications susceptibles d’accroître la résistance aux insecticides dans la population locale de moustiques. Par exemple, l’impulsion génétique peut être introduite dans le fond génétique de l’espèce cible locale de manière à ce que ses autres caractéristiques restent inchangées. D’autres méthodes pour contrôler les moustiques à impulsion génétique, y compris des mécanismes génétiques et des approches à base de petites molécules, sont également à l’étude.
Jusqu’à présent, la plupart des recherches ont été menées sur les moustiques Anopheles gambiae (Anopheles gambiae s.s. et Anopheles coluzzii), qui sont d’importants vecteurs du paludisme en Afrique. Les moustiques Aedes aegypti, qui sont d’importants vecteurs d’infections à arbovirus, ne se sont pas montrés aussi réceptifs que les Anophèles aux systèmes d’impulsion génétique « homing » modifiées par l’intermédiaire de CRISPR/Cas. Toutefois, les systèmes d’impulsion génétique basés sur la technologie CRISPR ont récemment fait leurs preuves en laboratoire et des gènes effecteurs antiviraux ont été identifiés pour le remplacement de population. Les travaux visant à appliquer la technologie d’impulsion génétique aux moustiques Culex, qui transmettent un certain nombre de maladies humaines et animales, en sont à un stade encore plus précoce, mais des outils pour faciliter l’édition du génome ont été mis au point.
En raison de leur isolement par rapport au continent, les îles abritent souvent une forte proportion de plantes et d’animaux indigènes qui contribuent à la biodiversité mondiale. Les espèces introduites envahissantes, telles que les rats et les chats sauvages, constituent une menace sérieuse pour les écosystèmes insulaires fragiles et la faune, en particulier les oiseaux. On estime qu’au cours des 500 dernières années, les espèces exotiques envahissantes ont contribué à près de la moitié des extinctions d’oiseaux dans le monde.
Des méthodes de biocontrôle génétique sont envisagées pour certains vertébrés nuisibles qui constituent un défi écologique et économique majeur dans les îles. Par exemple, l’élimination des rongeurs envahissants des îles s’est avérée être une intervention de conservation très efficace. Cependant, les méthodes existantes pour y parvenir se limitent en grande partie à l’utilisation de rodenticides, qui présentent d’autres contraintes éthiques, écologiques, sociales et financières. Les méthodes de biocontrôle génétique qui pourraient éliminer la population de rongeurs de l’île en réduisant la capacité de reproduction ont été proposées comme une alternative possible qui serait plus humaine et durable. La recherche sur le biocontrôle génétique des rongeurs et d’autres vertébrés nuisibles des îles est en cours, mais n’en est encore qu’à ses débuts.
Les agents pathogènes introduits présentent également un risque évident pour la biodiversité des îles. Le paludisme aviaire est une maladie introduite connue pour menacer l’avifaune indigène d’Hawaï. Puisque ce pathogène est transmis par des moustiques, il pourrait être sensible à des méthodes génétiques de biocontrôle similaires à celles développées pour les maladies humaines à transmission vectorielle.
Les espèces exotiques envahissantes sont des animaux, des plantes ou d’autres organismes non indigènes qui ont été introduits accidentellement ou délibérément dans des zones situées en dehors de leur aire de répartition naturelle, qui se sont établis dans ces nouvelles zones et qui causent des dommages à la biodiversité indigène, entraînant des coûts socio-économiques considérables. On estime que l’impact direct des espèces exotiques envahissantes coûte chaque année des milliards de dollars à l’économie mondiale.
Les introductions accidentelles peuvent résulter du commerce et des transports internationaux. La meilleure méthode pour contrôler les dommages causés par les espèces exotiques envahissantes est considérée comme étant la prévention par une détection précoce et une réponse rapide pour éradiquer la nouvelle espèce avant qu’elle ne s’établisse localement. Si cela n’est pas possible, les options de contrôle et de gestion comprennent le contrôle biologique à l’aide d’ennemis naturels de l’espèce envahissante, le contrôle chimique à l’aide de pesticides et de produits toxiques, et divers types de contrôle mécanique ou physique pour rendre l’environnement moins hospitalier pour la nouvelle espèce. Les efforts d’éducation visant à accroître la sensibilisation et l’utilisation de pratiques destinées à empêcher la propagation de l’espèce envahissante peuvent également s’avérer utiles. Néanmoins, l’Union internationale pour la conservation de la nature avertit que le rythme des nouvelles introductions augmente et que leurs impacts sur la sécurité alimentaire, sur la santé et sur la biodiversité risquent d’être aggravés par le changement climatique.
Les pesticides chimiques sont très couramment utilisés dans l’agriculture pour lutter contre les ravageurs, bien que le degré de dépendance varie d’un pays à l’autre. Il s’agit notamment d’insecticides pour les insectes nuisibles, d’herbicides pour les mauvaises herbes et de fongicides pour les agents pathogènes des plantes. Différents types de bonnes pratiques agricoles, telles que la rotation des cultures et les programmes de lutte intégrée contre les ravageurs, permettent de réduire la dépendance à l’égard des pesticides. La production biologique fait appel à beaucoup de concepts similaires, mais évite totalement l’utilisation de pesticides synthétiques. Les méthodes classiques de biocontrôle impliquant la dissémination d’ennemis naturels se sont révélées prometteuses pour réduire les dommages causés par les insectes ravageurs envahissants. La Technique de l’Insecte Stérile, qui utilise la dissémination d’insectes ravageurs stérilisés par rayonnement pour réduire l’accouplement productif et ainsi diminuer la taille de la population d’insectes ravageurs, a été utilisée contre plusieurs ravageurs de culture, peut-être le plus souvent pour la lucilie bouchère et la mouche méditerranéenne des fruits. En outre, les cultures transgéniques, telles que celles contenant un gène de la bactérie du sol Bacillus thuringiensis qui les rend résistantes aux insectes, suscitent de plus en plus d’intérêt.
Néanmoins, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) estime qu’entre 20 et 40% de la production agricole mondiale est perdue chaque année à cause des ravageurs. L’exposition prolongée aux pesticides synthétiques et biologiques a suscité des inquiétudes quant à leurs effets néfastes sur l’environnement et la santé humaine, et favorise l’émergence d’une résistance qui nécessite une utilisation accrue et le développement continu de nouvelles solutions de remplacement. L’insécurité alimentaire mondiale est un défi permanent que le changement climatique ne fera qu’exacerber.
Les approches génétiques de biocontrôle sont envisagées pour faire face à plusieurs problèmes mondiaux qui, malgré tous nos efforts, se sont avérés difficiles à résoudre par d’autres moyens disponibles. En modifiant ou en réduisant le nombre d’arthropodes vecteurs, elles pourraient contribuer à empêcher la transmission de pathologies infectieuses qui provoquent des maladies et tuent des millions de personnes dans le monde. Dans le domaine de l’agriculture, des technologies similaires pourraient contribuer à réduire les pertes de récoltes causées par les insectes ravageurs, dont le coût annuel a été récemment estimé à plus de 70 milliards de dollars dans le monde. Dans le domaine de la conservation, elles ont été proposées comme méthode de contrôle des espèces envahissantes qui, elles aussi, causent d’énormes pertes économiques et menacent la biodiversité.
Le biocontrôle génétique peut être utilisé en combinaison avec d’autres méthodes, offrant ainsi une nouvelle opportunité de maîtriser ces défis mondiaux.
Les méthodes de lutte conventionnelles comprennent des médicaments pour prévenir ou traiter les infections et les maladies humaines, des outils de lutte antivectorielle basés sur des pesticides chimiques, tels que l’application spatiale d’insecticides et l’utilisation de moustiquaires imprégnées d’insecticide, ainsi que des efforts de gestion environnementale visant à réduire l’habitat où les vecteurs se reproduisent et d’amélioration de logements pour réduire l’exposition des personnes à ces substances.
Ces méthodes sont toutes importantes, mais elles n’ont pas permis de résoudre entièrement le problème de santé publique posé par les maladies à transmission vectorielle. Les méthodes conventionnelles de lutte antivectorielle peuvent être extrêmement coûteuses à maintenir et la résistance aux insecticides est un problème chez les moustiques qui transmettent soit le paludisme, soit les maladies arbovirales courantes. Il est largement reconnu que les outils actuels ne suffiront probablement pas à éradiquer le paludisme. Par exemple, l’Organisation Mondiale de la Santé signale que les progrès contre le paludisme ont atteint un plateau ces dernières années et que la situation reste précaire, en particulier en Afrique subsaharienne. Elle signale également que l’incidence mondiale de la dengue a augmenté de façon significative et qu’environ la moitié de la population mondiale est menacée par la dengue et autres maladies virales véhiculées par la même espèce de moustique.
L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) est composée d’États et d’agences gouvernementales, ainsi que d’autres organisations et institutions s’intéressant à la conservation de la nature. L’UICN a récemment publié un rapport sur l’utilisation potentielle de la biologie de synthèse, y compris les impulsions génétiques, pour la conservation de la nature, reconnaissant la nécessité d’évaluations et de prises de décisions au cas par cas pour chacune des différentes applications de la biologie synthétique. Des discussions sont en cours concernant l’élaboration d’une politique de l’UICN sur les implications de la biologie de synthèse dans la conservation de la nature.
Le principe de précaution est basé sur un principe de la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement, qui stipule que « pour protéger l’environnement, l’approche de précaution doit être largement appliquée par les États selon leurs capacités. En cas de risque de dommages graves ou irréversibles, l’absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l’adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l’environnement ». Le préambule de la Convention sur la diversité biologique stipule également que « lorsqu’il existe une menace de réduction sensible ou de perte de la diversité biologique, l’absence de certitudes scientifiques totales ne doit pas être invoquée comme raison pour différer les mesures qui permettraient d’en éviter le danger ou d’en atténuer les effets ». Le principe de précaution est souvent interprété comme signifiant qu’une nouvelle technologie ne devrait pas être introduite tant qu’il persiste des d’incertitudes sur le fait qu’elle puisse nuire à l’environnement. Par conséquent, alors que le principe de précaution tel qu’il est rédigé fait référence à une action positive pour prévenir les dommages à la biodiversité, dans le cas des OGM, il a été appliqué pour empêcher des actions qui ont le potentiel de nuire à la biodiversité lorsque l’incertitude sur leur sûreté demeure. Cette perspective part du principe que le statu quo est toujours préférable à une nouvelle activité qui peut comporter des risques.
La Convention sur la diversité biologique (CDB) est un accord international relevant du Programme des Nations unies pour l’Environnement (PNUE) qui vise à conserver la biodiversité, à permettre l’utilisation durable des éléments constitutifs de la biodiversité et à permettre un partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques. 196 pays sont actuellement (2022) Parties à cet accord. La CDB considère les organismes contenant des impulsions génétiques comme des Organismes Vivants Modifiés (OVM ; également appelés Organismes Génétiquement Modifiés ou OGM). Les organismes modifiés par génie génétique étant des OVM, la CDB considère le protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques (CPB) comme le cadre approprié pour l’élaboration des politiques relatives à leurs mouvements transfrontières. Jusqu’à présent, la CDB a recommandé l’adoption d’une approche de précaution en ce qui concerne les décisions relatives aux activités sur le terrain, ainsi qu’un examen plus approfondi des méthodes d’évaluation des risques. Des travaux sont en cours dans le cadre du CPB afin d’élaborer des documents d’orientation volontaires supplémentaires pour soutenir l’évaluation au cas par cas des risques liés aux organismes vivants modifiés contenant des impulsions génétiques.
Plusieurs agences nationales et organisations internationales ont publié des déclarations sur la biosécurité et les aspects réglementaires des technologies d’impulsion génétique. Ceux-ci incluent :
Le groupe de haut niveau de l’Union africaine sur les technologies émergentes a officiellement soutenu la recherche visant à explorer l’utilisation de cette technologie pour lutter contre le paludisme.
Un certain nombre de sociétés académiques nationales et d’agences gouvernementales ont publié des recommandations pour l’évaluation des risques liés aux organismes à impulsion génétique.
La Convention sur la diversité biologique et l’Union internationale pour la conservation de la nature, dont de nombreux pays sont membres, examinent les technologies d’impulsion génétique et les nouvelles applications de la biologie synthétique.
Les agences gouvernementales nationales et locales et les fondations à but non lucratif sont actuellement les principaux bailleurs de fonds de la recherche sur l’impulsion génétique.
Peut-être, cela dépend du type de stratégie d’impulsion génétique et de l’organisme cible proposé.
Les technologies d’impulsion génétique autonomes sont conçues en tant que solutions à long terme, durables et économiques, qui nécessitent peu d’apports supplémentaires après un lâcher d’organismes contenant la technologie. Un produit qui est très spécifique à une espèce donnée, qui n’a pas besoin d’être réappliqué et qui a pour but d’offrir une efficacité durable, serait probablement commercialisé en tant que bien public.
Les produits d’impulsion génétique auto-limitatifs et les technologies de biocontrôle génétique non réplicatives, comme la Technique de l’Insecte Stérile (TIS), nécessiteront probablement d’applications régulières de la technologie dans l’espace et dans le temps afin de maintenir les effets souhaités. Ces types de produits peuvent présenter des caractéristiques plus attrayantes pour les entreprises.
Les produits de santé publique destinés aux pays en voie de développement sont généralement financés par des fonds publics et ont des marges bénéficiaires très faibles. De même, les produits destinés à la conservation seront probablement financés par des fonds publics. Les produits à usage agricole pourraient trouver un marché plus large, bien que cela ne soit pas certain.
Il existe un potentiel pour les petites entreprises locales, qui, par exemple, fournissent des services associés à la livraison des produits et au suivi.
Les technologies d’impulsion génétique font l’objet de recherches et de développements principalement dans les institutions universitaires, comme en témoignent les recherches scientifiques publiées. Certaines de ces institutions universitaires ont créé de petites entreprises de biotechnologie pour poursuivre le développement de produits. À l’heure actuelle, rien n’indique que de grandes entreprises multinationales participent ou s’intéressent aux technologies d’impulsion génétique, en particulier celles qui sont autonomes.
De nombreuses questions techniques, politiques et de sûreté doivent encore être abordées pour garantir que les technologies d’impulsion génétique continuent d’être explorées de manière efficace, responsable et éthique, comme notamment :
La possibilité pour les organismes à impulsion génétique de franchir les frontières nationales.
Les attentes en matière de sureté et d’efficacité qui justifieraient le passage à des essais sur le terrain.
Les mécanismes appropriés pour l’autorisation des lâchers.
Des enquêtes sur les attitudes dans les pays où les maladies sont endémiques sont en cours. Les premiers résultats suggèrent que les habitants des pays où les maladies sont endémiques sont ouverts au concept des moustiques génétiquement modifiés pour la santé publique, mais qu’ils ont des préoccupations qui devront être prises en compte.
L’Organisation mondiale de la santé a recommandé que le mécanisme de délibération et d’autorisation de la communauté soit déterminé par la communauté elle-même en fonction de ses normes.
Consentement : Les essais sur le terrain des technologies génétiques de biocontrôle sont guidés par l’objectif largement reconnu du consentement éclairé, qui consiste à protéger les intérêts des personnes qui seront affectées par la recherche. Selon les normes éthiques internationales, le consentement individuel éclairé est une condition préalable lorsque des informations personnelles identifiables ou des échantillons biologiques sont collectés au cours des essais. Pour les autres activités, une certaine forme d’autorisation au niveau de la communauté devrait être obtenue pour procéder selon les conditions négociées au cours du processus d’engagement. Les plans d’essai seront supervisés par un comité d’éthique institutionnel ou national (ou un comité d’examen), dont le rôle est de protéger les droits et le bien-être des participants à la recherche.
Codéveloppement : Le codéveloppement et l’intégration des connaissances sont de plus en plus reconnus comme essentiels à l’avancement des nouveaux produits. Le codéveloppement est envisagé comme un processus qui implique la contribution de la communauté sur le site de terrain proposé, permettant ainsi aux membres de la communauté de poser des questions et de s’engager dans un dialogue avec les chercheurs, ainsi que de faire des suggestions ou d’exprimer des préoccupations.
Évaluation des risques : Les évaluations des risques et/ou l’analyse d’impacts doivent également tenir compte des préoccupations de la communauté et des risques socio-économiques, tels que tout impact négatif potentiel sur les conditions de vie de base, la structure sociale, la santé publique ou les moyens de subsistance.
Réglementation : Dans la plupart des législations nationales, la consultation du public est une condition préalable à l’approbation des activités impliquant des OGM.
missing translation for Question #42
Un comité des Académies nationales des sciences, de l’ingénierie et de médecine (États-Unis), une organisation indépendante à but non lucratif chargée de fournir des conseils objectifs pour éclairer l’élaboration des politiques, s’est penché sur cette question. Dans un rapport de 2016, il a défini trois niveaux de parties prenantes à impliquer dans la discussion : les « communautés » de personnes qui vivent sur le site d’essai potentiel ou à proximité ; les « parties prenantes » qui vivent ailleurs mais qui ont des intérêts professionnels ou personnels directs dans l’utilisation de la technologie ; et les « publics » qui n’ont pas de lien direct mais dont les opinions peuvent éclairer la prise de décision démocratique. L’OMS a récemment défini une stratégie d’engagement éthique pour l’évaluation de moustiques génétiquement modifiés, y compris les moustiques à impulsion génétique en tant qu’outils de santé publique. Cette stratégie reconnaît que les obligations éthiques à l’égard de chacun de ces groupes diffèrent et que, par conséquent, les exigences prévues en matière d’engagement seront également différentes. Les activités d’engagement appropriées varieront également en fonction des différentes étapes de l’évaluation.
Étant donné que les moustiques sont mobiles et que l’impulsion génétique est censée se propager par le biais de la reproduction dans l’espèce cible, les questions transfrontières sont pertinentes pour les moustiques à impulsion génétique. Ceci a suscité des inquiétudes quant à la gouvernance internationale de ces organismes. Il existe de nombreux accords multinationaux qui abordent les mouvements transfrontières. Le consensus général de ces conventions internationales est qu’avant un lâcher dans l’environnement, une notification doit être publiée et un processus consultatif bilatéral ou multilatéral doivent être mis en place avec les pays vers lesquels l’organisme modifié est susceptible de se déplacer.
En ce qui concerne les moustiques Anopheles gambiae à impulsion génétique en cours de développement pour prévenir la transmission du paludisme, l’espèce cible est limitée au continent africain. Sous la direction de l’Agence de développement de l’Union africaine (AUDA-NEPAD), des mécanismes visant à soutenir l’harmonisation régionale des exigences réglementaires pour les méthodes de lutte antivectorielle en Afrique, y compris les moustiques à impulsion génétique, sont en cours d’élaboration.
La réglementation gouvernementale des moustiques à impulsion génétique impliquera probablement plus d’une autorité réglementaire et plus d’un type de permis pour l’importation et la recherche. Dans les pays qui sont Parties au protocole de Cartagena, les organismes génétiquement modifiés doivent être examinés par un mécanisme de biosécurité établi en vertu de la loi nationale sur la biosécurité. Il est prévu que les ministères de la santé et de l’environnement, et éventuellement d’autres, devraient être impliqués. Aux États-Unis, qui ne sont pas signataires du protocole de Cartagena, les moustiques génétiquement modifiés visant à réduire la taille de la population (approches de suppression de la population) sont actuellement réglementés par l’Agence de protection de l’environnement, tandis que les moustiques génétiquement modifiés visant à réduire la capacité vectorielle (modification de la population) sont réglementés par l’Agence fédérale américaine des produits alimentaires et médicamenteux.
Le premier niveau d’examen des plans et des protocoles de recherche et d’évaluation sera vraisemblablement assuré par des organismes de supervision situés dans les institutions de recherche concernées, bien que dans certains pays, de tels comités puissent fonctionner au niveau national. Les comités institutionnels de biosécurité peuvent élaborer des politiques et des procédures institutionnelles de biosécurité et examiner des propositions de recherche individuelles pour la protection de la santé et de l’environnement. Les comités institutionnels d’éthique, également connus sous le nom de comités d’examen institutionnels ou de comités d’examen éthique, supervisent la recherche biomédicale et comportementale impliquant des êtres humains dans le but de protéger les droits et le bien-être des participants à la recherche. Les communautés où des essais sont proposés doivent être consultées et doivent approuver les plans de recherche.
De nombreux mécanismes de supervision établis pour d’autres technologies s’appliquent aux moustiques génétiquement modifiés. Il s’agit notamment de mécanismes concernant d’autres organismes génétiquement modifiés, d’autres outils de lutte antivectorielle et d’autres interventions de santé publique. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié des orientations pour l’évaluation des moustiques génétiquement modifiés, qui décrivent les considérations à prendre en compte quant à l’innocuité et l’efficacité qu’il conviendrait d’examiner à chaque phase de cette évaluation, afin d’étayer les décisions concernant le développement et la mise en œuvre, ainsi que les politiques et les organismes de surveillance institutionnels et réglementaires pertinents.
L’approche par étapes comprendra l’examen des caractéristiques de sûreté et d’efficacité. Comme le recommandent l’Organisation mondiale de la santé et la Convention sur la diversité biologique, il s’agira d’examiner les éventuels effets néfastes sur la santé humaine ou animale ou sur l’environnement, et la protection de la biodiversité. Les dangers pour la santé qui ont été considérés comme prioritaires sont les suivants : la possibilité que la modification entraîne une augmentation de l’abondance des espèces de moustiques porteuses de l’agent pathogène en question ; une modification qui augmenterait la capacité des moustiques à transmettre l’agent pathogène ciblé ou d’autres agents pathogènes ; des modifications qui réduiraient la capacité à lutter contre les moustiques avec des méthodes conventionnelles ; une augmentation de l’allergénicité ou de la toxicité des moustiques pour l’homme ou pour d’autres organismes ; ou une augmentation de la virulence des agents pathogènes portés par le moustique. Les risques environnementaux identifiés comme prioritaires comprennent le potentiel de : propagation de la modification à d’autres espèces qui causerait des dommages à l’écosystème ; dommages indirects à d’autres espèces qui dépendent des moustiques modifiés pour un service essentiel ; augmentation d’une espèce concurrente nuisible ; ou effets indésirables d’ordre supérieur pour la communauté écologique.
L’évaluation de l’efficacité (la capacité à produire l’effet désiré) est un aspect important de l’approche d’évaluation par étapes. L’évaluation de l’efficacité commence par l’évaluation des caractéristiques entomologiques, par exemple si la modification est stable, si elle affecte négativement la survie ou la compétitivité sexuelle des moustiques et si elle réduit la capacité des moustiques à se reproduire ou à transporter l’agent pathogène en question. Ces caractéristiques peuvent aider à prédire l’efficacité future du produit dans la prévention des maladies. Toutefois, la capacité du produit à réduire l’incidence ou la prévalence de l’infection ou de la maladie ne peut être évaluée que dans le cadre d’essais ultérieurs à grande échelle sur le terrain. Ces essais seront menés de la même manière que d’autres types d’essais cliniques, conformément aux normes éthiques internationalement reconnues et aux exigences réglementaires nationales et locales applicables. Des jalons de performance prédéterminés détermineront si les résultats d’efficacité justifient la poursuite des évaluations à chaque étape.
L’ACME (American Committee of Medical Entomology) a publié des lignes directrices pour la manipulation en toute sécurité des arthropodes vecteurs de maladies humaines et animales, y compris les moustiques. Ces directives décrivent les installations et les formations requises pour éviter tout lâcher non autorisé du milieu confiné. Elles tiennent compte des vecteurs qui contiennent des molécules d’ADN recombinant et de ceux qui ont été modifiés par des transgènes capables d’impulsion génétique. Ces recommandations adoptent une approche basée sur le risque, les exigences en matière de confinement variant en fonction des conséquences potentielles d’un lâcher prématuré.
Le parcours recommandé comporte quatre phases.
La première phase comprend des études initiales sur la sureté et l’efficacité, menées en laboratoire et dans des cages contenant un petit nombre de moustiques. Toutes ces études sont menées à l’intérieur, dans des conditions de confinement appropriées, afin d’éviter que les moustiques modifiés ne s’échappent dans l’environnement. Si les moustiques modifiés présentent les caractéristiques biologiques et fonctionnelles souhaitées, l’évaluation peut être poursuivie.
La deuxième phase élargit les essais en milieu confiné dans des conditions de confinement physique ou écologique, destinés à limiter la migration vers l’extérieur des moustiques modifiés, et comprend des études dans de grandes cages en plein air ou dans des conditions d’isolement géographique/spatial/climatique. Cela permettra de vérifier si les moustiques modifiés continuent à présenter les caractéristiques attendues qui prédisent une capacité à réduire la transmission de la maladie. En fonction des résultats de cette deuxième phase, les essais pourront passer à la troisième phase ou revenir en arrière pour mener des études supplémentaires.
La phase 3 comprend des essais de lâcher en milieu ouvert afin d’évaluer la performance dans diverses conditions de transmission de maladies. Au cours de cette phase, la capacité des moustiques modifiés à réduire l’incidence ou la prévalence de l’infection ou de la maladie peut être directement mesurée. Si les essais de la phase 3 démontrent une efficacité et une sûreté suffisantes, les autorités réglementaires et les décideurs politiques pourront envisager une mise en œuvre plus large du produit en tant qu’outil de santé publique.
La quatrième phase comprend le contrôle continu de l’efficacité et de la sûreté du produit dans des conditions opérationnelles.
Il peut être nécessaire de répéter la première et la troisième phase pour améliorer la technologie et affiner les procédures jusqu’à ce que les conditions requises pour passer à la phase suivante soient remplies
Si l’on considère qu’il s’agit d’un système d’impulsion génétique autonome qui devrait persister dans l’environnement, il serait plus réaliste de concevoir le processus d’essai progressif comme un continuum de lâchers de plus en plus étendus.
La décision de passer d’une phase d’essai à l’autre nécessitera une autorisation réglementaire appropriée et l’accord des communautés où les essais auront lieu.
Avant qu’un nouveau produit de lutte antivectorielle ne soit mis sur le marché, il est généralement testé dans le cadre d’une série d’essais cliniques ou d’essais sur le terrain de plus en plus étendus. Cette approche d’évaluation par étapes permet aux développeurs et aux autorités de réglementation de voir si le nouveau produit fonctionne et s’il peut être utilisé en toute sécurité. La recherche sur les nouveaux produits commence par des tests approfondis en laboratoire. Les développeurs soumettent les résultats de laboratoire aux autorités réglementaires, qui déterminent si et comment le produit peut passer aux essais cliniques ou aux essais sur le terrain. Une fois l’approbation réglementaire obtenue, les essais commenceront à très petite échelle dans des conditions qui minimisent les risques pour les personnes ou l’environnement. Si les résultats de ces essais à petite échelle semblent prometteurs, les autorités réglementaires peuvent approuver le passage à des essais de sûreté et d’efficacité à plus grande échelle. Sur la base de ces résultats, les autorités réglementaires décideront si et dans quelles conditions le produit peut être mis à la disposition du public. Si, à une phase quelconque de ce processus, le produit ne démontre pas les caractéristiques de sûreté et d’efficacité convenues, il ne doit pas aller de l’avant, et les développeurs devront décider s’il est possible d’améliorer le produit pour reprendre le processus d’essai, et de quelle manière.
Outre l’évaluation des risques techniques propres au projet, l’autorité réglementaire peut également exiger une analyse d’impact. La nécessité et l’étendue de cette requête peuvent être définies légalement et influencées par le risque perçu d’effets négatifs. Certaines juridictions limitent l’analyse d’impact à l’analyse des effets sur l’environnement biophysique, tandis que d’autres incluent les impacts sociaux, économiques et culturels du projet. Cette évaluation basée sur les impacts se concentrera sur les changements négatifs, neutres ou bénéfiques qui pourraient résulter du projet et pourra envisager d’autres solutions pour répondre au besoin exprimé. L’analyse d’impact peut avoir une portée très large, couvrant les domaines de l’environnement, de la socio-économie et de la santé.
Tous les paradigmes d’évaluation des risques suivent les principes standards acceptés de la formulation du problème, de l’identification des dangers, de la caractérisation des dangers, de l’évaluation de l’exposition et des conséquences, et de la caractérisation des risques. Il existe cependant différentes méthodologies d’évaluation des risques. L’évaluation qualitative des risques utilise des termes descriptifs pour classer les résultats de l’évaluation, tels que « élevé », « moyen » ou « faible ». L’évaluation semi-quantitative des risques évalue les risques à l’aide d’un score qui reflète davantage la probabilité. L’évaluation quantitative des risques utilise des chiffres et des graphiques pour donner une estimation numérique plus précise des risques. Toutes les méthodes sont utiles pour parvenir à une évaluation précise des risques et présentent à la fois des points forts et des points faibles. L’essentiel est de comprendre les circonstances dans lesquelles une méthode particulière est la plus appropriée.
La modélisation mathématique et la simulation informatique peuvent aider à planifier la collecte de données pour étayer l’évaluation des risques, et peuvent soutenir l’évaluation et la gestion des risques en prédisant la propagation et l’efficacité des organismes à impulsion génétique à une grande échelle spatiale dans le cadre d’une série d’hypothèses. La modélisation peut également jouer un rôle dans l’évaluation de certaines considérations relatives à la biosécurité et au coût des organismes à impulsion génétique.
Non. Les organismes à impulsion génétique possèdent des caractéristiques qui doivent être prises en compte lors de l’évaluation des risques, telles que la capacité de la modification à se propager dans les populations sauvages de l’espèce cible et l’irréversibilité possible des impulsions génétiques autonomes. Toutefois, plusieurs experts ont estimé que ces caractéristiques n’étaient pas entièrement nouvelles et qu’elles pouvaient être prises en compte dans les cadres réglementaires et d’évaluation des risques existants, tels que ceux utilisés pour d’autres agents de biocontrôle et organismes génétiquement modifiés.
Pourquoi les risques liés aux technologies d’impulsion génétique sont-ils évalués au cas par cas ?
La communication sur les risques implique un échange interactif d’informations et d’opinions tout au long du processus d’analyse des risques. L’un des éléments d’une évaluation solide des risques consiste à mettre en place un dialogue avec les parties prenantes de manière continue, en communiquant les informations de manière claire et compréhensible afin de faciliter une contribution active à l’évaluation des risques et à la planification de la gestion des risques, et d’éclairer la prise de décision.
La communication avec les communautés potentiellement affectées en amont et pendant le processus d’évaluation des risques aidera les développeurs à définir le champ d’application de l’évaluation des risques, à identifier les préoccupations à prendre en compte et à déterminer s’il convient d’aller de l’avant. Les développeurs devront fournir des réponses aux questions des communautés, ajuster leurs plans si nécessaires pour répondre aux préoccupations, et obtenir l’autorisation de la communauté pour entreprendre l’étude. Le mécanisme de délibération et d’accord de la communauté est déterminé au mieux par la communauté elle-même en fonction de ses normes.
Dans la plupart des processus réglementaires nationaux, la contribution des citoyens/communautés est prise en considération lors des phases spécifiques de consultation publique du processus décisionnel. Si cette contribution soulève des questions scientifiques qui n’ont pas été suffisamment prises en compte dans l’évaluation des risques environnementale, elle peut entraîner un réexamen de l’évaluation des risques. Dans certains pays, l’utilisation d’organismes génétiquement modifiés fait également l’objet d’une évaluation environnementale stratégique (ÉES) et d’une évaluation des impacts environnementaux et sociaux (ÉIES). L’ÉES facilite l’examen des impacts d’une catégorie générale d’interventions et est conçue pour soutenir la prise de décision politique. L’ÉIES est adaptée à la mise en œuvre de projets spécifiques et examine leurs impacts positifs et négatifs potentiels dans les domaines de l’environnement, de la socio-économie et de la santé. L’ÉES et l’ÉIES requièrent toutes les deux une contribution substantielle de la part des parties prenantes.
L’évaluation des risques sera effectuée séparément pour chaque produit a impulsion génétique, en tenant compte des conditions particulières dans lesquelles il sera testé ou utilisé. Chaque produit individuel reflétera une combinaison unique de caractéristiques – y compris l’espèce cible, la méthode de modification, les caractéristiques modifiées et la finalité ou l’utilisation prévue – et peut présenter un ensemble unique de dangers et de risques pertinents. En raison de la diversité des applications potentielles des technologies d’impulsion génétique, la Convention sur la diversité biologique et l’Organisation mondiale de la santé ont recommandé que les évaluations des risques soient effectuées au cas par cas.
L’évaluation des risques interviendra à différents moments du processus de développement et sera effectuée par :
Les développeurs de produits : L’Organisation mondiale de la santé a recommandé que les développeurs de technologies d’impulsion génétique procèdent à une évaluation des risques avant chaque nouvelle phase d’essai ou chaque extension des essais, afin de rassembler les données les plus informatives pour créer un produit sûr et efficace. Les développeurs peuvent procéder eux-mêmes à l’évaluation des risques ou confier cette tâche à des experts externes qui n’ont pas d’intérêt direct dans le succès du produit. Les résultats de ces évaluations des risques aideront les développeurs à comprendre quelles données ils doivent collecter et quels plans de gestion ils doivent mettre en place pour réduire les risques à un niveau acceptable. Ces informations seront utiles pour préparer les demandes auprès des autorités réglementaires.
Les régulateurs : Les autorités réglementaires nationales procèdent à une évaluation des risques dans le cadre de l’examen des demandes soumises par les développeurs. Pour les régulateurs, les types de risques pris en compte sont circonscrits par les mandats légaux et les pouvoirs accordés aux agences en charge de l’évaluation des risques. Le champ de compétence de ces agences est défini par les lois nationales, ainsi que leurs règlements et politiques d’application. Par conséquent, le champ d’application de l’analyse des risques pour les régulateurs n’est pas illimité et est également soumis à des délais d’exécution prescrits par la loi.
L’évaluation des risques est un élément essentiel au processus d’analyse des risques. Le concept de risque tient compte à la fois de la probabilité et de l’ampleur du dommage découlant d’un danger identifié (un événement non désiré qui pourrait avoir un impact négatif non désiré). L’évaluation des risques est un processus structuré et objectif qui permet d’identifier les dangers pertinents (identification et caractérisation des dangers), la probabilité qu’ils se produisent (évaluation de l’exposition) et l’importance de leurs conséquences (évaluation des conséquences). L’ensemble de ces éléments permet de comprendre le niveau de préoccupation approprié pour chaque danger.
L’analyse des risques est un processus structuré d’identification, d’évaluation et de gestion des problèmes potentiels, qui permet d’atteindre un niveau de sécurité approprié. En bref, elle comprend l’identification des dangers, l’évaluation des risques, la gestion des risques et la communication des risques. Le processus d’analyse des risques comprend :
L’identification des dommages qui pourraient résulter de l’activité envisagée,
La prise en compte des voies possibles par lesquelles cette activité pourrait nuire à la santé humaine ou animale, à l’environnement ou au bien-être socio-économique,
L’évaluation de la probabilité que le dommage se produise ainsi que ses conséquences probables dans le cadre des scénarios pertinents aux actions prévues, ce qui aide à caractériser les risques associés à l’activité,
La préparation des stratégies pour éviter ou réduire tout risque identifié par le biais de la gestion des risques,
La communication avec les décideurs et les parties prenantes concernés tout au long du processus afin de leur permettre d’identifier des préoccupations, de partager des idées et de décider de l’acceptabilité de tout risque identifié.
Le processus aboutit à une prise de décision par les autorités nationales et les parties prenantes sur l’acceptabilité des risques restants dans le contexte des avantages potentiels.
Pour qu’une impulsion génétique synthétique fonctionne, un petit nombre de gènes contenus dans la construction d’impulsion génétique doivent être exprimés dans les bonnes cellules et au bon moment dans l’organisme cible. Les interrupteurs génétiques qui activent et désactivent ces gènes importants au bon moment ne fonctionneront pas dans toutes les espèces, en particulier dans les espèces très éloignées de l’espèce hôte d’origine. Par conséquent, non seulement l’impulsion génétique doit pénétrer les bonnes cellules (cellules germinales) d’un deuxième organisme pour pouvoir être transmise aux générations suivantes, mais tous les composants de l’impulsion génétique doivent également fonctionner correctement dans le nouvel hôte.
Les gènes peuvent passer d’une espèce à l’autre sous certaines conditions, mais cela ne signifie pas qu’ils seront fonctionnels dans la nouvelle espèce.
L’ADN se déplace entre les espèces par deux voies : 1) l’hybridation interspécifique (introgression) et 2) le transfert horizontal (ou latéral) de gènes. Si deux espèces sont suffisamment proches pour permettre une hybridation réussie (accouplement et production d’une progéniture viable et fertile) et que les espèces cohabitent dans le même environnement, un système d’impulsion génétique conçu pour une espèce et introduit dans celle-ci pourrait passer dans une autre espèce. Par exemple, on peut s’attendre à ce qu’il en soit ainsi pour les espèces apparentées au sein du complexe d’espèces Anopheles gambiae, dont la plupart des espèces sont des vecteurs du paludisme.
Le transfert horizontal (latéral) de gènes fait référence au mouvement de l’ADN entre les espèces qui n’implique pas d’accouplement ou d’hybridation. Le transfert horizontal de gènes est courant chez les bactéries, mais rare chez les plantes et les animaux, où il se produit à l’échelle du temps de l’évolution par des mécanismes qui restent à clarifier. Plus rares encore sont les exemples où l’ADN transféré est exprimé et conserve sa fonction d’origine.
En l’état actuel des connaissances scientifiques, il est hautement improbable qu’une construction d’impulsion génétique synthétique puisse pénétrer et fonctionner dans des espèces non apparentées à l’espèce cible. Le fonctionnement des technologies d’impulsion génétique dépend de l’action de tous leurs éléments au sein de cellules très spécifiques et à des moments également spécifiques. Cette spécificité nécessite des éléments moléculaires sur mesure qui ne fonctionneront pas correctement chez d’autres espèces. Néanmoins, cette question devrait être examinée dans le cadre d’une évaluation des risques au cas par cas.
Oui. La question du remplacement compétitif, également appelé principe d’exclusion réciproque, est une possibilité que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et d’autres organisations recommandent de prendre en compte dans l’évaluation des risques. Toutefois, la question de savoir si cette possibilité peut entraîner des dommages comporte deux volets. La première partie de la question est de savoir si cela pourrait se produire. La seconde consiste à savoir si cela entraînerait une augmentation de la transmission des maladies. Par exemple, il existe des preuves du remplacement compétitif d’Aedes aegypti par Aedes albopictus, là où leur distribution se chevauche. Cependant, Aedes albopictus est généralement considéré comme un vecteur moins efficace d’arbovirus — tels que la dengue — qu’Aedes aegypti, de sorte qu’il est peu probable que cela se traduise par une augmentation substantielle du risque de maladies en général. Une étude approfondie des effets des programmes de lutte antivectorielle à base d’insecticides ciblant des espèces d’anophèles en Afrique, suggère que la réduction du nombre de moustiques Anopheles gambiae a parfois été suivie d’une augmentation locale d’autres espèces apparentées, mais que ces autres espèces étaient des vecteurs moins efficaces du paludisme.
Non. Les moustiques obtiennent du sucre comme source d’énergie à partir de diverses sources, y compris les fleurs. En visitant les fleurs, ils peuvent occasionnellement ramasser et transmettre du pollen. Toutefois, dans les régions tropicales ou subtropicales du monde, ces fleurs sont également visitées par de nombreuses autres espèces d’insectes, y compris celles qui sont mieux adaptées à la pollinisation que les moustiques. Il n’existe aucune preuve expérimentale ou circonstancielle que les moustiques Anopheles ou Aedes sont des pollinisateurs importants en Afrique, ce qui rend extrêmement improbable que l’élimination de ces moustiques ait un effet négatif sur les communautés végétales locales.
Il existe plus de 3 000 espèces de moustiques dans des environnements allant de l’Arctique aux régions les plus méridionales du monde en dehors de l’Antarctique. Environ 800 espèces de moustiques ont été observées en Afrique. Il n’est donc pas possible de supposer qu’il existe une réponse unique à cette question. Le contrôle des vecteurs a toujours été au cœur des efforts de lutte contre le paludisme et des autres maladies transmises par les moustiques. Pour les technologies d’impulsion génétique appliquées au moustique vecteur du paludisme Anopheles gambiae, il y a plusieurs considérations importantes à prendre en compte. Ces moustiques sont uniquement présents sur le continent africain. Le complexe Anopheles gambiae est composé de huit espèces apparentées, dont l’Anopheles gambiae s.s., qui ne représentent donc qu’un faible pourcentage de l’ensemble de la population africaine de moustiques. La recherche écologique sur le comportement des moustiques et l’expérience tirée des efforts déployés au fil des ans pour réduire et éliminer cette espèce de l’environnement permettent de conclure qu’Anopheles gambiae n’est pas une espèce « clé de voûte ». Les écologistes définissent une espèce clé de voûte comme une espèce dont un écosystème dépend fortement et dont l’élimination déclencherait un changement radical dans cet écosystème.
En principe, oui. Les systèmes d’impulsion génétique auto-limitatifs sont conçus spécifiquement pour disparaître de la population après un certain temps en l’absence de lâchers répétés. Les moustiques à impulsion génétique autonomes (des moustiques contenant une modification destinée à s’établir de manière stable dans la population cible) pourraient théoriquement être contrôlés ou éliminés par une ou plusieurs stratégies suivant leur lâcher dans l’environnement. Les moyens à disposition pour éliminer les moustiques à impulsion génétique d’un environnement sont notamment les suivants :
Utilisation d’insecticides chimiques ;
Lâcher d’un grand nombre de moustiques porteurs de séquences d’ADN naturelles ou modifiées qui sont résistantes à l’impulsion génétique ;
Lâcher d’une deuxième technologie d’impulsion génétique pour cibler et inactiver la première ;
Utilisation de petites molécules qui inhibent spécifiquement l’enzyme d’édition génomique Cas (si elle fait partie du système d’impulsion génétique), interrompant ainsi l’impulsion génétique.
Certaines de ces stratégies ont été testées en laboratoire ou en insectarium, mais elles n’ont pas été testées sur le terrain, car aucun essai sur le terrain n’a encore été réalisé avec des moustiques à impulsion génétique.
Pour plus d’informations :
https://www.who.int/publications/i/item/9789240025233
https://www.youtube.com/watch?v=sdgdJQ_lO8&list=PLbopRNGowKJ8b1EJMAU53ZC46vgY4p2cz
https://www.annualreviews.org/doi/abs/10.1146/annurev-ento-020117-043154
Les moustiques à impulsion génétique ne sont pas conçus pour provoquer l’extinction de l’espèce de moustique cible. L’extinction d’espèces de moustiques n’est pas nécessaire pour que les technologies d’impulsion génétique aient l’effet souhaité sur la santé publique.
Bien qu’un type de technologie de moustique à impulsion génétique vise à supprimer la population de l’espèce de moustique ciblée en réduisant son taux de reproduction, l’objectif final est de réduire ou d’éliminer la transmission de la maladie, et non le moustique lui-même. Cela peut se faire en réduisant le nombre de moustiques de l’espèce ciblée à un niveau trop bas pour maintenir le cycle de vie de l’agent pathogène, mais pas au point de provoquer l’extinction de l’espèce.
Cette éventualité est hautement improbable, car cela nécessiterait qu’une série d’événements extrêmement rares se produise :
Transfert d’ADN : Les analyses des génomes des primates (y compris l’homme) n’ont révélé la présence d’aucun gène d’insecte, ce qui suggère qu’un transfert de gènes des moustiques vers l’homme (transfert horizontal de gènes) n’a jamais été détecté.
Localisation de l’ADN : Il serait également très improbable que, même si l’ADN d’un moustique était transféré lors de la piqûre, cet ADN puisse se retrouver à l’intérieur d’une cellule humaine et encore moins qu’il puisse se retrouver dans un spermatozoïde ou un ovule humain d’une manière qui lui permette de conserver sa fonction.
Fonctionnalité de l’ADN : La plupart des systèmes d’impulsion génétique sont créés de manière à ce qu’ils soient seulement actifs dans le système reproducteur du moustique, ce qui signifie que les composants moléculaires qui constituent l’impulsion génétique ne sont pas susceptibles de fonctionner à l’intérieur d’une cellule humaine.
Étant donné que chaque événement pris individuellement a une probabilité extrêmement faible de se produire, la probabilité d’un transfert de gènes fonctionnels d’un moustique modifié à un être humain devrait être extrêmement faible. Néanmoins, cette question doit être abordée dans le cadre d’une évaluation des risques au cas par cas.
Oui. Plusieurs études ont été menées pour identifier les dommages potentiels à des objectifs de protection reconnus. Dans le cas d’une technologie d’impulsion génétique autonome qui pourrait être utilisée pour lutter contre le paludisme en Afrique, ces études ont identifié les risques potentiels pour la santé humaine et animale, la biodiversité et la qualité de l’eau comme étant les préoccupations considérées les plus importantes.
Des études sur l’éventualité de ces dommages ont soulevé des questions concernant la stabilité du trait génétique sur plusieurs générations ainsi que la prévisibilité des effets, comme par exemple l’effet potentiel sur des organismes autres que la population de moustiques ciblée. D’autres questions techniques concernent le développement éventuel d’une résistance au fil du temps de la part du moustique ou de l’agent pathogène et la perte d’immunité des personnes vivant dans les zones traitées au fil du temps, bien que ces mêmes préoccupations soient également pertinentes pour d’autres outils de lutte contre le paludisme tels que les médicaments et les insecticides. L’OMS a recommandé qu’une analyse des risques soit réalisée au cas par cas pour chaque version spécifique de moustiques à impulsion génétique devant être utilisée dans des conditions particulières, afin d’aider les parties prenantes à comprendre et à prendre une décision concernant l’opportunité de procéder à des essais ou à une mise en œuvre.
Il existe des précédents de mouvements transfrontières autonomes. Le contrôle biologique classique, qui consiste par exemple à lâcher des insectes non indigènes dans le but de réduire ou d’éliminer un insecte nuisible à l’économie ou la santé publique, est pratiqué depuis plus d’un siècle. Les organismes de biocontrôle devraient s’établir de manière permanente sur de zones étendues, indépendamment des frontières politiques. La Convention internationale pour la protection des végétaux (CIPV) a établi des lignes directrices pour l’exportation, l’expédition, l’importation et le lâcher d’organismes de biocontrôle, qui décrivent les responsabilités des gouvernements et des importateurs. Certains programmes de vaccination des animaux sauvages visent à apporter des modifications génétiques non héréditaires à des espèces vivant en liberté, telles que le raton laveur et le renard, afin de réduire le risque de transmission de la rage à l’homme. La possibilité d’une dispersion autonome, par exemple du pollen ou des spores, a également été prise en compte pour les cultures génétiquement modifiées.
La plupart des préoccupations exprimées se répartissent en quelques grandes catégories :
Mouvements transfrontières : Des questions ont été soulevées quant à l’adéquation des mécanismes de gouvernance actuels pour faire face aux implications des mouvements transfrontières d’organismes à impulsion génétique.
Consentement : En ce qui concerne le lâcher d’organismes à impulsion génétique qui se répandront au-delà du site de lâcher initial, des questions se posent quant à savoir qui doit donner son consentement préalable et quels sont les mécanismes appropriés pour l’obtention de ce consentement.
Effets sur l’environnement : Certaines parties prenantes se soucient du fait que les effets des organismes à impulsion génétique seront imprévisibles et que les méthodes d’évaluation des risques ne permettront pas d’estimer les effets potentiels à long terme sur l’environnement.
Extinctions : Certains s’inquiètent du fait que les technologies de suppression de la population pourraient entraîner l’éradication de l’espèce cible.
Non. L’impulsion génétique est fréquente dans la nature, indépendamment de l’intervention humaine. Les technologies d’impulsion génétique découlent directement d’idées et de technologies apparues au milieu du XXe siècle et étudiées depuis lors. Par exemple, en 1947, JE Vanderplank a testé l’utilisation d’un système d’impulsion génétique naturel pour contrôler une espèce de mouche tsé-tsé afin de prévenir la trypanosomiase africaine (maladie du sommeil). Notre capacité à imiter et générer synthétiquement ces systèmes d’impulsion naturels à l’aide des techniques de la biologie moléculaire est quant à elle plus récente.
Cette question doit être abordée pour chaque utilisation proposée des technologies d’impulsion génétique. La sûreté des technologies d’impulsion génétique est une préoccupation importante partagée par toutes les parties prenantes. Des sources d’expertise telles que la Convention sur la diversité biologique et l’OMS ont convenu qu’en raison de la diversité des applications possibles de l’impulsion génétique leur sûreté doit être évaluée au cas par cas. La sûreté est évaluée par un processus appelé analyse des risques, qui prend en compte à la fois les caractéristiques de la technologie et celles de l’environnement dans lequel elle sera utilisée. Ce processus aidera les gouvernements et les citoyens à déterminer s’il existe des risques associés aux produits à impulsion génétique et dans l’affirmative, s’ils sont acceptables.
Le World Mosquito Program (WMP) a mis au point une souche unique de moustique Aedes aegypti qui est infectée par la bactérie intracellulaire Wolbachia, ensuite transmise des parents à la progéniture. Les moustiques infectés par Wolbachia sont beaucoup moins capables de transmettre la dengue et d’autres virus transmis par les moustiques. Le produit du WMP a démontré une réduction conséquente de la transmission de la dengue lors d’un essai clinique de grande envergure mené en Indonésie.
Des recherches sont en cours pour comprendre si des microbes naturels présents dans les moustiques anophèles, dont Wolbachia, pourraient provoquer une réfractarité aux parasites du paludisme qui empêcherait la transmission de la maladie. Toutefois, il est important de noter que les technologies à base de Wolbachia nécessiteraient un plus grand nombre de moustiques infectés par Wolbachia et davantage de lâchers que les technologies d’impulsion génétique autonomes et certaines technologies auto-limitatives. Cela pourrait présenter des limites opérationnelles et logistiques pour l’utilisation des technologies à base de Wolbachia ou d’autres symbiotes contre le paludisme dans l’ensemble des conditions rencontrées en Afrique.
Oxitec a mis au point une variante de la technique des insectes stériles en utilisant des moustiques Aedes aegypti génétiquement modifiés contenant des gènes létaux pour la génération suivante. Lorsque les moustiques mâles ont été lâchés en grand nombre, les moustiques femelles locales qui se sont accouplées avec eux ont été incapables de produire une descendance viable, et le nombre total de moustiques Aedes aegypti a été réduit. Avec ce produit de première génération, il n’était pas prévu que la modification reste dans l’environnement au-delà du lâcher initial. Oxitec est maintenant passé à une technologie de deuxième génération dans laquelle le gène introduit n’agit que sur la progéniture femelle. Lorsque ces moustiques modifiés sont lâchés, seuls les mâles survivent et se reproduisent, et ces mâles peuvent transmettre la modification à la moitié de leur progéniture.
Il y a parfois confusion quant à savoir si cette méthode de biocontrôle génétique utilise l’impulsion génétique, mais ce n’est pas le cas. Cette technologie de deuxième génération dépend de l’hérédité mendélienne, dans laquelle les gènes de l’un ou l’autre parent sont généralement transmis à environ la moitié de la progéniture à chaque génération suivante. Ainsi, la modification persistera dans la population locale de moustiques pendant un certain temps, mais le nombre de moustiques modifiés continuera à diminuer. En revanche, l’objectif de l’impulsion génétique est d’augmenter le nombre de moustiques modifiés au sein de la population ciblée au fil du temps, pour une meilleure durabilité et un meilleur rapport coût-efficacité.
Le paludisme en Afrique est présent depuis le nord de l’Afrique du Sud jusqu’à la limite sud du désert du Sahara, ce qui représente une zone très vaste. L’élimination du paludisme en Afrique a nécessité et continuera de nécessiter l’utilisation de nombreux outils. Les technologies d’impulsion génétique promettent de fournir un nouvel ensemble d’outils complémentaires très efficaces pour contribuer à l’élimination du paludisme.
La technique de l’insecte stérile et les programmes de biocontrôle génétique connexes nécessitent d’élever et de lâcher en permanence un grand nombre d’insectes pour contrôler durablement la population ciblée. S’il est tout à fait possible que ces programmes contribuent à l’élimination du paludisme dans les zones urbaines, ils sont beaucoup moins adaptés à la lutte contre le paludisme dans les nombreuses villes et villages éloignés et très dispersés à travers le continent. La possibilité que les effets des technologies d’impulsion génétique persistent plus longtemps et, dans certains cas, se propagent au sein d’espèces spécifiques de moustiques transmettant le paludisme, en fait des outils intéressants pour l’élimination de la transmission du paludisme sur l’ensemble de la région concernée.
Des techniques de biologie moléculaire sont utilisées pour développer la construction génétique qui doit être introduite dans le moustique. La construction est ensuite micro-injectée dans un œuf de moustique pour être incorporée dans l’ADN du moustique.
Les moustiques et certains autres organismes sont potentiellement de bonnes cibles pour les technologies d’impulsion génétique parce qu’ils ont un temps de génération court et une progéniture nombreuse, ce qui permettra aux caractéristiques associées à l’impulsion génétique de se propager assez rapidement pour produire l’effet souhaité sur la santé publique dans un délai observable. Le temps de génération des moustiques est de quelques semaines seulement.
Il y a au moins trois raisons pour lesquelles les systèmes d’impulsion génétique peuvent être envisagés à la place d’autres techniques génétiques de biocontrôle :
Ceux qui ont le potentiel de persister et de se propager au sein de populations interfécondes de l’organisme cible seront mieux adaptés aux besoins de contrôle qui s’étendent sur de vastes zones (au niveau national ou régional).
Les méthodes de biocontrôle génétique telles que la technique de l’insecte stérile et les techniques apparentées nécessitent l’élevage, le transport et le lâcher continus d’un grand nombre d’insectes afin de maintenir le contrôle de l’organisme cible. Le maintien de ces programmes dans le temps peut s’avérer difficile et exigeant en termes de ressources. La capacité des technologies d’impulsion génétique à persister et à se propager pourrait faciliter leur mise en œuvre et leur maintien, contribuant ainsi à leur impact durable.
Les technologies d’impulsion génétique peuvent être conçues soit pour réduire ou éliminer l’organisme cible de l’environnement local, soit pour laisser l’espèce cible dans l’environnement, mais en la modifiant génétiquement de manière à ce qu’elle ne constitue plus une menace pour la santé ou la biodiversité. Cette flexibilité est une caractéristique importante des technologies d’impulsion génétique.
De nombreuses espèces de moustiques ont été signalées comme transmettant le paludisme dans le monde entier, mais elles n’ont pas toutes les mêmes qualités en tant que vecteurs, ce qui fait que certaines sont beaucoup plus difficiles à contrôler que d’autres. Par exemple, l’une des raisons pour lesquelles Anopheles gambiae s.s. est un vecteur si dangereux du paludisme humain en Afrique est qu’il préfère presque exclusivement piquer les êtres humains, alors que les autres vecteurs ont tendance à piquer également des animaux afin d’obtenir le sang nécessaire à leur reproduction. D’autres membres de la famille Anopheles gambiae (espèces apparentées) transmettent également le paludisme, et il devrait être relativement simple d’adapter les mêmes approches d’impulsion génétique à ces espèces. Le contrôle des membres d’Anopheles gambiae en Afrique devrait avoir un impact important sur la transmission du paludisme. La même technologie pourrait être appliquée à d’autres vecteurs du paludisme.
La dengue et plusieurs autres maladies arbovirales importantes sont principalement transmises par les moustiques Aedes aegypti, de sorte que le ciblage de ces moustiques pourrait réduire considérablement la transmission de la maladie.
Les technologies de moustiques à impulsion génétique sont destinées à être utilisées dans le cadre de programmes de gestion intégrée des vecteurs, en conjonction avec d’autres méthodes. Un grand nombre de ces activités peuvent être intégrées dans des plans de lutte contre les maladies déjà en cours, auquel cas les programmes nationaux de lutte contre les vecteurs et les maladies pourraient jouer un rôle central dans la mise en œuvre de ces plans. La mise en œuvre des technologies de moustiques génétiquement modifiés impliquera une analyse préparatoire, le développement de produits spécifiques au site, l’application/livraison, ainsi qu’un travail de surveillance et d’évaluation après la mise en œuvre. Nombre de ces fonctions font partie des activités nationales actuelles de lutte contre les vecteurs ou peuvent s’appuyer sur elles.
Les technologies d’impulsion génétique pourraient potentiellement améliorer et permettre de réduire l’incidence des maladies transmises par les moustiques, telles que le paludisme en Afrique et la dengue dans de nombreuses régions du monde, ce qui se traduirait par une meilleure santé globale. Les technologies d’impulsion génétique sont en cours de développement pour complémenter d’autres outils de lutte contre les maladies, et pourraient même améliorer l’efficacité des autres outils. Outre les avantages directs pour la santé publique qui pourraient résulter de l’utilisation des technologies d’impulsion génétique, ceux qui adoptent ces technologies pourraient bénéficier de leur facilité d’utilisation et de leur faible coût, ce qui contribuerait à la durabilité de leurs effets protecteurs.
Comment les moustiques à impulsion génétique pourraient-ils prévenir la transmission de maladies ?
L’arsenal de méthodes conventionnelles de lutte antivectorielle s’est avéré efficace pour réduire et, dans certains cas, éliminer les maladies à transmission vectorielle. L’ingénierie environnementale (par exemple, l’assèchement des marais) et les insecticides (principalement le DDT) ont joué un rôle important dans l’élimination du paludisme en Amérique du Nord et en Europe occidentale. En Afrique, les moustiquaires imprégnées d’insecticide et les pulvérisations d’insecticides à l’intérieur des habitations ont considérablement réduit le fardeau du paludisme. Cependant, les méthodes de contrôle basées sur les insecticides sont coûteuses, sujettes au développement d’une résistance chez le moustique et susceptibles de manquer d’importantes populations de moustiques transmettant la maladie. Les progrès dans la lutte contre le paludisme ont plafonné ces dernières années et le problème reste particulièrement grave en Afrique. Les avantages théoriques des moustiques génétiquement modifiés sont les suivants :
Assurer une protection qui bénéficie à toutes les personnes de la zone traitée, indépendamment de leur statut socio-économique ou de leur accès aux soins médicaux, sans imposer de charges supplémentaires ni demander aux gens de modifier leur comportement ;
N’affecter directement que les espèces cibles, contrairement à certaines méthodes à base d’insecticides, et donc avoir moins d’effets sur la biodiversité ;
Atteindre les populations de moustiques et les sites de reproduction qui sont traditionnellement les plus difficiles et les plus coûteux à cibler avec l’utilisation des stratégies conventionnelles de lutte antivectorielle, en exploitant le comportement naturel de recherche des moustiques pour se trouver les uns les autres et trouver des sites de ponte ;
Être utiles dans les environnements urbains et ruraux, que le vecteur soit présent à haute ou à faible densité ;
Fournir une protection continue dans les situations où la fourniture d’autres outils de lutte contre le paludisme a été interrompue.
Certaines technologies d’impulsion génétique pourraient être très durables, ne nécessitant que quelques lâchers de moustiques génétiquement modifiés pour avoir des effets importants et durables sur une espèce cible. Certaines technologies d’impulsion génétique pourraient s’étendre sur de vastes zones géographiques qu’il est difficile de couvrir à l’aide de technologies conventionnelles telles que les insecticides. Ces caractéristiques devraient rendre leur utilisation très rentable. En outre, la protection continue fournie par les moustiques à impulsion génétique autonomes pourrait empêcher la réintroduction d’une maladie dans les régions où elle a été éliminée, ou protéger les régions contre l’introduction de nouvelles maladies transmises par les moustiques.
Les moustiques transmettent de nombreuses maladies humaines et animales mortelles et débilitantes. Ceux qui effectuent des recherches sur les technologies d’impulsion génétique chez les moustiques envisagent plusieurs utilisations possibles, telles que : 1) prévenir la transmission des parasites du paludisme dans les zones à forte incidence ; 2) prévenir la transmission des arbovirus causant des maladies tels que la dengue ou le Zika dans les régions où ils sont très présents ; ou 3) contrôler la transmission du paludisme aviaire qui menace les populations fragiles d’oiseaux indigènes dans les habitats insulaires.
Si elles sont déployées avec succès chez les moustiques, les technologies d’impulsion génétique pourraient être utilisées pour réduire le risque de ces maladies en réduisant les populations de moustiques porteurs de la maladie (suppression de la population) ou en réduisant la capacité des moustiques à héberger l’agent pathogène (remplacement ou modification de la population).
Oui. La résistance pourrait se développer par la sélection d’organismes porteurs d’un changement génétique qui n’est pas sensible au système d’impulsion génétique, de la même manière que se crée la résistance aux insecticides ou aux médicaments fréquemment utilisés. La résistance est potentiellement préoccupante parce qu’elle pourrait empêcher la diffusion et la persistance du système d’impulsion génétique au sein de l’espèce cible et réduire les effets souhaités du système d’impulsion génétique sur cette population cible. Dans le cas de l’impulsion génétique à des fins de santé publique, cela serait problématique si cela se produisait avant que la transmission de la maladie puisse être éliminée.
Pour les insecticides et les médicaments, la résistance est combattue en passant d’un type de produit à un autre ou en utilisant des combinaisons de produits. Cependant, l’impulsion génétique offre de nouveaux moyens de réduire la possibilité d’apparition d’une résistance dans les organismes à impulsion génétique. Les chercheurs travaillent activement à la recherche de mécanismes permettant d’éviter ou de retarder le développement de la résistance à l’impulsion génétique. Par exemple, ils ciblent le système d’impulsion génétique sur des gènes cruciaux où un changement génétique serait préjudiciable à l’organisme, et sur les parties du gène cible qui sont les moins susceptibles d’être modifiées.
Cette éventualité est considérée comme très improbable, car la technologie d’impulsion génétique serait extrêmement inefficace pour diffuser un trait génétique dans les populations humaines. Bien qu’il soit techniquement possible d’assembler un système d’impulsion génétique de cellules humaines, ce système serait très inefficace en termes de diffusion car les humains ont un temps de génération relativement long (20 ans) et peu de descendants (le taux de fertilité moyen mondial est d’environ 2,5 enfants par femme).
L’impulsion génétique ne doit pas être confondu avec la modification génétique, qui est utilisée dans certaines applications de thérapie génique humaine. La thérapie génique n’implique qu’une modification génétique des cellules somatiques (les cellules constituant les parties du corps autres que les spermatozoïdes et les ovules), et ces modifications ne sont pas transmises à la génération suivante.
Oui. Les méthodes d’impulsion génétique peuvent être classées non seulement en fonction du mécanisme moléculaire utilisé pour les concevoir, mais aussi en fonction de leur capacité à persister et à se propager dans l’environnement. Les différents types de technologies d’impulsion génétique peuvent avoir des objectifs différents. Les principales méthodes d’impulsion génétique décrites à ce jour (2023) sont les suivantes :
Le terme « autonome » fait référence à une approche d’impulsion génétique dans laquelle la modification héréditaire est destinée à s’établir de manière stable au sein de populations interfécondes de l’espèce cible.
Le terme « auto-limitatif » fait référence à une approche d’impulsion génétique dans laquelle la modification est censée disparaître de la population après une certaine durée en l’absence de lâchers répétés de l’organisme modifié par impulsion génétique.
La localisation est une approche d’impulsion génétique qui limite la propagation spatiale de la modification au sein de la population cible.
Les différents types de technologies d’impulsion génétique ont également des objectifs différents. Les stratégies qui visent à réduire la taille de la population de l’espèce cible sont appelées des stratégies de suppression (ou de réduction) de la population. Les stratégies qui visent à modifier certaines caractéristiques fonctionnelles ou comportementales de l’espèce cible, telles que la capacité à transmettre un agent pathogène, sont appelées des stratégies de remplacement (ou de modification, d’altération ou de conversion) de la population.
La diminution de la valeur sélective (compétitivité relative) se traduit par une diminution du nombre de descendants contribuant à la génération suivante. Cependant, si tous ces descendants ou la plupart d’entre eux possèdent le gène modifié, le gène peut encore se propager. Tant que l’avantage héréditaire obtenu grâce à la transmission de gènes est supérieur à tout désavantage associé à la valeur sélective qu’elle pourrait entraîner, l‘impulsion génétique devrait continuer à se répandre et à augmenter sa prévalence.
Les stratégies génétiques de biocontrôle peuvent être très spécifiques aux espèces ciblées. Cette spécificité repose en grande partie sur le comportement d’accouplement propre à chaque espèce et sur la stérilité interspécifique largement observée dans la nature. Les systèmes d’impulsion génétique dépendent de la production d’une progéniture viable et fertile pour être transmis et leur effet de propagation nécessite donc un accouplement productif. Les méthodes d’ingénierie génétique peuvent être utilisées pour améliorer la spécificité de l’espèce cible à plusieurs niveaux.
Toutefois, il arrive parfois que des espèces étroitement apparentées puissent se croiser avec succès. Dans de telles circonstances, des mesures supplémentaires devraient être prises pour renforcer la spécificité uniquement pour l’espèce cible si cela est jugé nécessaire. Ces mesures pourraient inclure la construction du système génétique à l’aide de composants qui ne fonctionnent que chez l’espèce cible.
Tous les systèmes d’impulsion génétique conçus sont des assemblages de gènes et d’éléments régulateurs associés nécessaires pour que le système d’impulsion génétique soit efficace dans les bonnes cellules, au bon moment et dans l’organisme cible. En raison des exigences temporelles et spatiales très strictes en matière d’expression des gènes pour les impulsion génétiques fonctionnelles, les éléments régulateurs utilisés pour contrôler l’expression des gènes sont généralement très spécifiques à l’espèce.
Les impulsions génétiques synthétiques utilisant une enzyme Cas d’un système CRISPR/Cas comprennent un composant « guide » qui reconnaît une séquence spécifique dans l’ADN de l’espèce cible et peut être choisi par le chercheur pour son unicité par rapport à l’espèce.
Outre l’action de l’enzyme Cas sur la séquence correcte, les centaines de bases d’ADN flanquant le site du chromosome coupé par Cas doivent également être suffisamment spécifiques au gène cible pour obtenir une impulsion.
Le « homing » fonctionne au sein d’une cellule germinale qui produit un spermatozoïde ou un ovule. Il peut être initié par des gènes naturels (Homing Endonuclease Gene – HEG) ou par des imitations synthétiques de ces gènes, qui codent pour une enzyme (endonucléase) qui reconnaîtra et coupera une séquence d’ADN spécifique. Dans une cellule dont l’un des chromosomes contient le gène de l’endonucléase et l’autre non, l’enzyme crée une rupture au niveau de la séquence d’ADN spécifiée dans le chromosome qui ne contient pas l’endonucléase. Les processus naturels de réparation cellulaire aboutissent à la copie du gène de l’endonucléase dans le chromosome réparé. Cette création très efficace de cellules germinales possédant deux copies du gène de l’endonucléase (et de tous les gènes associés, appelés ensemble la « construction » de l’endonucléase) crée une forte impulsion, car les gènes seront maintenant hérités par la progéniture qui reçoit l’un ou l’autre chromosome et le processus de copie continuera à se répéter dans cette progéniture. Il en résulte une augmentation de l’hérédité d’un élément génétique dans les générations suivantes.
La construction de l’endonucléase peut être ciblée sur un endroit spécifique du chromosome opposé en ajoutant un morceau d’acide nucléique qui sert de « guide ». La construction de l’endonucléase peut également être modifiée pour avoir d’autres fonctions que la production de l’enzyme de coupure de l’ADN. Cela pourrait permettre d’introduire une nouvelle caractéristique (trait) dans l’organisme. Par exemple, une nouvelle caractéristique pourrait résulter de l’inactivation du gène ciblé dans lequel la construction d’endonucléase est copiée. Ou encore, un autre gène codant pour une nouvelle caractéristique peut être couplé au gène de l’endonucléase de sorte qu’il soit transporté et copié dans le chromosome opposé avec le gène de l’endonucléase. Cette construction peut également contenir un interrupteur génétique capable d’activer et de désactiver les autres gènes au moment opportun du cycle cellulaire. Grâce à l’impulsion génétique, la nouvelle caractéristique peut se propager par accouplement au sein d’une population interféconde.
Oui. Il existe plusieurs façons d’obtenir une augmentation de l’hérédité d’un élément génétique, ou « impulsion », dans le milieu naturel, et certaines d’entre elles peuvent également être recréées en laboratoire.
Le mécanisme appelé « homing » est souvent utilisé pour l’aboutissement d’un système d’impulsion génétique. Les endonucléases « homing » sont des enzymes qui existent dans la nature et qui permettent à un gène hérité d’un parent d’être dupliqué dans le génome de sa progéniture, de sorte que cette dernière porte deux copies du gène et le transmettra à tous ses descendants. Ce mécanisme est une forme de sur-réplication et peut facilement être imité en utilisant l’édition génomique CRISPR/Cas.
Non. Des technologies fonctionnelles d’impulsion génétique ont été mises au point et testées en laboratoire qui n’utilisent aucun composant des systèmes d’édition génomique CRISPR/Cas. Beaucoup le font cependant, et ce, parce que CRISPR/Cas donne aux chercheurs et aux ingénieurs une capacité sans précédent de contrôler la précision et la spécificité de la technologie par rapport à l’espèce. Cependant, d’autres stratégies peuvent également fonctionner.
L’édition de gènes (ou génomique) consiste à modifier l’ADN d’un organisme, tandis que l’impulsion génétique fait référence à un modèle d’hérédité.
Le terme « édition génomique » est utilisé pour décrire des modifications relativement précises du génome réalisés à l’aide d’un certain nombre d’outils qui fonctionnent comme des ciseaux moléculaires (techniquement appelés endonucléases – protéines qui coupent les acides nucléiques tels que l’ADN et l’ARN). Le système CRISPR-Cas est une version populaire et puissante des ciseaux moléculaires pour l’édition génomique. L’édition génomique est utilisée à diverses fins, notamment pour la recherche scientifique fondamentale et le développement de nouveaux traitements pour les maladies.
L’édition génomique peut également être utilisée pour créer des gènes en laboratoire. L’un des mécanismes utilisés à cet effet est un composant du système d’édition génomique CRISPR-Cas. Il existe également d’autres moyens par lesquels les chercheurs peuvent obtenir les schémas d’hérédité préférentielle qui caractérisent l’impulsion génétique.
Les technologies d’impulsion génétique synthétiques sont actuellement (2023) en phase de découverte et ne sont testées qu’en laboratoire dans le cadre de recherche et de développement en cours. Aucune technologie d’impulsion génétique n’est utilisée en dehors du laboratoire. Toutefois, des efforts sont en cours pour tracer les bases techniques et réglementaires qui permettront de prendre des décisions éclairées sur les essais potentiels sur le terrain et l’utilisation à grande échelle des technologies d’impulsion génétique.
Non. Il existe différents types d’impulsion génétique et certains sont conçus pour perdre leur effet au bout d’un certain temps (système auto-limitatif). Dans ce cas, la modification devrait disparaître de la population en l’absence de lâchers répétés de l’organisme à impulsion génétique. Un autre type est décrit comme « autonome ». Dans ce cas, la modification héréditaire est censée s’établir de manière stable au sein de populations interfécondes de l’espèce cible. Ce type de modification a suscité des inquiétudes quant à l’irréversibilité des effets au niveau de la population. Toutefois, les scientifiques travaillent actuellement sur les moyens d’arrêter ou d’inverser les effets de ces impulsions. Bien que ces méthodes ne soient pas encore au point, il s’agit d’un besoin reconnu et d’un sujet de recherche actif. (Voir aussi « Que savons-nous des risques liés à l’impulsion génétique ? »)
Non. L’impulsion génétique se produit fréquemment dans la nature, dans de nombreux organismes, sans aucune intervention humaine. Les génomes de tous les organismes contiennent des gènes qui présentent un mécanisme d’impulsion génétique. Barbara McClintock a reçu le prix Nobel de physiologie ou de médecine en 1983 pour sa découverte des transposons ou « gènes sauteurs » qui présentent un mécanisme d’impulsion génétique. On sait aujourd’hui que les transposons sont courants et abondants dans les génomes de tous les organismes et que leur importance est bien documentée. Il existe de nombreux autres mécanismes naturels créant une hérédité préférentielle des gènes, des allèles et des chromosomes.
Tous les organismes à impulsion génétique ne sont pas génétiquement modifiés, car les éléments génétiques dotés d’une capacité d’impulsion sont présents dans la nature. En fait, tous les génomes qui ont été examinés à ce jour contiennent des impulsions génétiques naturelles. Les techniques de la biologie moléculaire moderne ont permis d’imiter divers types d’impulsion génétique naturelle en laboratoire, et les systèmes d’impulsion génétique créés à l’aide de la technologie de l’ADN recombinant sont appelés impulsions génétiques synthétiques.
L’impulsion génétique est un phénomène génétique et n’est pas une « invention ». Le terme fait référence à un modèle d’hérédité que l’on trouve couramment dans la nature. En s’inspirant de ces nombreux exemples naturels connus depuis des décennies, les scientifiques travaillent en laboratoire pour mettre au point des systèmes d’impulsion génétique qui puissent introduire des traits génétiques chez certains insectes ou d’autres animaux ou plantes de manière à avoir un impact sur les populations dans l’intérêt de la santé publique, de la protection de l’environnement ou de l’agriculture.
Les scientifiques ont proposé des moyens d’utiliser l’augmentation de l’hérédité d’un élément génétique qui caractérise l’impulsion génétique pour développer des solutions à des problèmes auparavant insolubles pour la santé publique, la sécurité alimentaire et la biodiversité. Par exemple, les technologies d’impulsion génétique ont été proposées pour résoudre des problèmes de santé publique tels que la transmission d’agents pathogènes transmis par des arthropodes, des problèmes agricoles causés par des insectes nuisibles, des mauvaises herbes, des agents pathogènes des plantes, et des problèmes de conservation causés par des espèces envahissantes.
Les systèmes d’impulsion génétique se propagent par l’accouplement entre des individus porteurs du système d’impulsion et d’autres qui ne le sont pas. Tous les systèmes d’impulsion génétique ont le potentiel de se propager dans une certaine mesure. La caractéristique déterminante de l’impulsion génétique est la transmission préférentielle à la génération suivante, ce qui se traduit par une augmentation de la fréquence de l’élément d’impulsion génétique (propagation) au sein de la population cible. Certaines technologies d’impulsion génétique sont conçues avec des limitations temporelles ou spatiales sur le degré de propagation anticipé, et l’impulsion génétique devrait donc rester plus localisée.
L’augmentation de l’hérédité d’un gène (modifié ou naturel) qui caractérise l’impulsion génétique entraînera une augmentation de la fréquence ou de la prévalence de ce gène au sein de la population d’organismes dans laquelle il a été introduit. En fonction des caractéristiques de l’impulsion génétique, la quasi-totalité des membres d’une population interféconde de l’espèce cible pourra éventuellement contenir la modification. La propagation de l’impulsion génétique à partir des individus initialement introduits dans la population plus large peut être comparée à l’ondulation créée lorsqu’une goutte d’eau touche une flaque d’eau calme.
Les systèmes d’impulsion génétique sont un type de biocontrôle génétique dans lequel des variantes génétiques ou des formes génétiquement modifiées d’une espèce cible servent d’agents de contrôle de manière à réduire ou à éliminer la menace que représente une espèce cible. Dans le cas des technologies d’impulsion génétique, la variation génétique ou la forme génétiquement modifiée de l’espèce cible est fertile et capable de transmettre efficacement la modification génétique responsable de l’effet de biocontrôle aux générations suivantes, de sorte qu’en fin de compte, tous les individus d’une population ou la plupart d’entre eux seront porteurs de la modification. Comme d’autres formes de biocontrôle génétique, l’impulsion génétique peut être utilisée dans les domaines de la santé publique, de l’agriculture et de la conservation.
L’impulsion génétique est un processus qui promeut ou favorise l’héritage de certains gènes sur plusieurs générations. Si le terme spécifique d’ « impulsion génétique » a d’abord été employé au début du 21e siècle, le phénomène génétique appelé « impulsion » a été reconnu pour la première fois au début du 20e siècle comme un phénomène naturel dans de nombreux organismes. C’est dans les années 1950 que les scientifiques ont pour la première fois évoqué la possibilité d’utiliser des systèmes d’impulsion pour lutter contre des insectes nuisibles.
De nombreuses plantes et de nombreux animaux possèdent deux copies différentes de chacun de leurs gènes, ayant hérité l’une de leur parent mâle et l’autre de leur parent femelle. Dans le cas d’un gène qui n’est pas soumis à l’impulsion génétique, chacune de ces copies a la même probabilité d’être transmise à la génération suivante. C’est ce que l’on appelle souvent l’hérédité mendélienne. Dans le cas d’un gène qui présente une impulsion génétique, l’une de ces copies sera transmise de façon préférentielle à la génération suivante. Ce modèle d’hérédité préférentielle signifie qu’en un laps de temps relativement court, les gènes à impulsion génétique peuvent rapidement se répandre au sein d’une population.
Le biocontrôle génétique peut être appliqué à d’autres vecteurs de maladies que les moustiques. Par exemple, la technique de l’insecte stérile a été utilisée pour contrôler la mouche tsé-tsé, vecteur de la trypanosomiase africaine (maladie du sommeil). Certains chercheurs étudient également la possibilité d’appliquer le biocontrôle génétique aux tiques.
Certaines maladies humaines et animales, comme la maladie de Lyme et la peste, sont transmises directement ou indirectement par les rongeurs. Pour ces maladies, les mêmes types de méthodes de biocontrôle génétique proposées pour réduire les rongeurs envahissants à des fins de conservation pourraient également être utiles pour la santé publique.
Bien que les outils conventionnels à base d’insecticides aient été un pilier de la lutte contre les insectes vecteurs de maladies, ils présentent des limites. Les outils à base d’insecticide nécessitent une ré-application continue qui peut être coûteuse à maintenir. La résistance aux insecticides est aussi un problème permanent. Les outils à base d’insecticide ont toujours été moins efficaces contre certains moustiques vecteurs, comme ceux des maladies arbovirales, en raison de la difficulté d’atteindre leurs sites de reproduction. L’OMS a déclaré qu’il était urgent de mettre au point de nouveaux outils pour lutter contre les maladies à transmission vectorielle.
Est-ce que des mesures de biocontrôle ont été utilisées pour les moustiques vecteurs de maladies ?
Les vaccins sont des outils importants pour lutter contre de nombreuses maladies infectieuses. Plusieurs vaccins potentiels contre la dengue sont à l’étude et l’un d’entre eux a été recommandé pour une utilisation dans des circonstances limitées. De même, la recherche sur les vaccins contre le paludisme se poursuit depuis des décennies et un vaccin a reçu la recommandation de l’OMS pour les enfants vivant dans des régions à forte transmission de la maladie, où il a démontré une réduction de cas graves. Plus récemment, des essais cliniques ont montré qu’un autre type de vaccin réduisait l’incidence du paludisme chez les jeunes enfants et son utilisation a été approuvée dans certains pays.
Le paludisme et la dengue se sont révélés être des maladies très difficiles à contrôler. Un contrôle et/ou une élimination réussis de ces maladies nécessiteront une multitude d’outils différents. La lutte contre les vecteurs devrait rester importante pour plusieurs raisons. Par exemple, les vaccins qui préviennent la maladie clinique n’arrêtent pas la transmission du parasite ou du virus, de sorte que la menace d’infection demeure. Le besoin de vaccins approuvés dépasse actuellement la disponibilité, ce qui laisse de nombreuses personnes sans protection. En outre, les vaccins doivent généralement être administrés en plusieurs doses, ce qui pose des problèmes de coût et d’observance. L’OMS a déclaré que de nouveaux outils de lutte antivectorielle sont nécessaires de toute urgence et que la contribution potentielle des moustiques génétiquement modifiés doit continuer à être étudiée.
Oui, plusieurs méthodes de biocontrôle sont utilisées contre les moustiques.
Les poissons : Parmi les approches de biocontrôle les plus conventionnelles, les poissons tels que ceux du genre Gambusia (alias « poisson-moustique ») sont utilisés depuis des décennies pour contrôler la reproduction des moustiques dans les plans d’eau, tels que les zones de culture du riz.
Les bactéries : Certains isolats des bactéries Bacillus thuringiensis et Bacillus sphaericus sont largement utilisés pour lutter contre les moustiques et sont vendus aux jardiniers et aux propriétaires comme alternative aux pesticides chimiques.
Les champignons : Les champignons tels que Beauveria bassiana et Metarhizium anisopliae sont des agents de contrôle biologique facilement disponibles pour lutter contre les moustiques. Par exemple, Beauveria bassiana est un ingrédient actif dans certains produits de contrôle des moustiques de In2Care, un piège à moustiques développé pour protéger les humains contre les moustiques qui transmettent les virus du Zika, du chikungunya, de la fièvre jaune et de la dengue.
La génétique : Les approches génétiques de biocontrôle sont également appliquées aux moustiques. Les méthodes de biocontrôle génétique peuvent être utilisées pour réduire le nombre de moustiques vecteurs ou limiter leur capacité à transporter un ou plusieurs agents pathogènes. Par exemple, trois versions de la technique de l’insecte stérile sont en cours d’essai sur Aedes aegypti, un moustique responsable de la transmission de la dengue, de la fièvre jaune, du virus Zika et d’autres virus pathogènes pour l’homme. Ces techniques comprennent : la technique classique de l’insecte stérile, qui utilise la stérilisation induite par la radiation pour réduire les accouplements productifs ; la technique de l’insecte incompatible, qui exploite certains effets de la bactérie intracellulaire Wolbachia pour empêcher les accouplements productifs ; les moustiques génétiquement modifiés, qui contiennent des gènes létaux pour la génération suivante de moustiques. Un autre type de méthode, destinée à avoir des effets persistants, utilise la bactérie Wolbachia de manière à immuniser de façon permanente le moustique Aedes aegypti contre l’infection par les virus de la dengue, de la fièvre jaune et du Zika.
Les moustiques peuvent transmettre des agents pathogènes par leur piqûre. Les moustiques femelles ont besoin des nutriments contenus dans le sang pour assurer le développement de leurs œufs. Par conséquent, seules les femelles piquent les humains ou d’autres animaux pour obtenir ce sang, alors que les mâles se nourrissent exclusivement de plantes. Si l’homme ou l’animal que la femelle moustique pique est infecté par un agent pathogène susceptible d’être transmis par les moustiques, la femelle moustique peut absorber l’agent pathogène lorsqu’elle se nourrit de sang. Elle peut alors transmettre cet agent pathogène à l’homme ou à l’animal qu’elle pique ensuite. Certains agents pathogènes ne peuvent pas être transmis par les moustiques de cette manière. Pour être transmis à la personne suivante, l’agent pathogène doit survivre au système digestif du moustique, idéalement se multiplier et revenir dans les pièces buccales du moustique. De nombreux agents pathogènes transmis par le sang, comme le VIH et le virus de l’hépatite, ne survivent pas dans les moustiques. En outre, l’agent pathogène et le moustique doivent être compatibles. Seuls certains agents pathogènes peuvent survivre et se multiplier chez certaines espèces de moustiques. Par exemple, les parasites du paludisme ne peuvent être transmis que par les moustiques anophèles. Enfin, l’agent pathogène doit également être compatible avec l’hôte humain ou animal. Certains agents pathogènes animaux ne peuvent pas vivre chez l’homme, et vice versa. Par exemple, certains parasites du paludisme qui provoquent des maladies chez les oiseaux ne peuvent pas infecter les humains.
Aujourd’hui, la lutte contre les maladies à transmission vectorielle s’effectue en grande partie à l’aide de médicaments pour prévenir ou traiter l’infection humaine par l’agent pathogène et de pesticides pour prévenir ou réduire les populations de vecteurs, diminuant ainsi leur transmission de l’agent pathogène. Cependant, les agents pathogènes développent une résistance aux médicaments largement utilisés et les vecteurs développent une résistance aux pesticides fréquemment utilisés. En outre, il n’existe pas de médicaments efficaces pour certains agents pathogènes, tels que les arbovirus. Des vaccins sont disponibles pour certaines maladies à transmission vectorielle, mais pas pour toutes. La gestion de l’environnement, qui vise à éliminer les sites de reproduction potentiels des vecteurs de maladies, est également utilisée. Toutefois, l’utilité de cette mesure est limitée par la difficulté de trouver et d’éliminer tous les sites de reproduction possibles. Cette situation crée un besoin urgent de considérer des mesures de contrôle alternatives.
De nombreux agents infectieux sont transmis à l’homme ou à l’animal par des insectes ou des tiques qui se nourrissent de sang, appelés vecteurs de maladies. Les maladies à transmission vectorielle représentent un énorme fardeau pour la santé publique, causant environ 700 000 décès par an à travers le monde. Les moustiques sont les vecteurs les plus importants des maladies humaines, transmettant de nombreux agents pathogènes parasitaires et viraux, notamment ceux qui causent le paludisme, la filariose, la dengue, le chikungunya, le Zika et la fièvre jaune.
La technique de biocontrôle génétique connue sous le nom de technique de l’insecte stérile, basée sur l’irradiation, est utilisée en toute sécurité dans le monde entier depuis des décennies pour lutter contre les parasites agricoles. Par exemple, en Amérique centrale, des mouches stériles de la lucilie bouchère sont lâchées pour empêcher la migration de ces importants ravageurs du bétail depuis l’Amérique du Sud vers le Mexique, l’Amérique centrale et le sud des États-Unis. Des mouches méditerranéennes des fruits mâles radiostérilisées sont ou ont été élevées en masse et utilisées pour lutter contre ce ravageur majeur des agrumes et d’autres fruits dans des pays tels que l’Argentine, le Mexique, le Portugal, la République dominicaine, le Guatemala, l’Espagne, l’Afrique du Sud et les États-Unis. Le génie génétique est également appliqué à la lutte contre les parasites agricoles tels que la mouche méditerranéenne des fruits et la chenille légionnaire d’automne. La technologie FriendlyTM d’Oxitec contre la chenille légionnaire d’automne a été approuvée par l’agence brésilienne de biosécurité.
Le biocontrôle génétique le plus développé et le plus largement utilisé est la technique de l’insecte stérile (TIS). Il s’agit d’une stratégie de lutte contre les insectes, conçue vers le milieu du 20e siècle, dans laquelle une espèce cible d’insectes est élevée en masse, puis stérilisée à l’aide de rayonnements ionisants qui provoquent une multitude de mutations chromosomiques aléatoires conduisant à l’infertilité. Un grand nombre d’insectes irradiés sont relâchés dans les populations sauvages de la même espèce cible. De préférence, seuls des mâles stérilisés sont lâchés et lorsqu’ils trouvent une femelle sauvage fertile et s’accouplent avec elle, la femelle ne produit aucune progéniture viable bien que son désir de trouver un partenaire et de se reproduire ait été satisfait. Des lâchers réguliers et répétés de mâles stériles au fil du temps peuvent entraîner une réduction de la population cible et, dans certains cas, son élimination locale. Un autre exemple de biocontrôle génétique implique l’utilisation d’un phénomène d’incompatibilité hybride dans lequel l’accouplement entre deux souches d’une espèce entraîne un nombre réduit de descendants par rapport à l’accouplement entre individus de la même souche.
Cela dépend de la définition utilisée. Si l’on définit la modification génétique comme un changement du matériel génétique par l’utilisation de la biotechnologie moderne (génie génétique), la réponse est non. Le biocontrôle génétique n’utilise pas toujours des organismes génétiquement modifiés. Le patrimoine génétique d’un organisme peut être modifié de plusieurs manières autres que par la biologie moléculaire. Traditionnellement, cela est accompli au fil du temps par le biais de la reproduction sélective. Les changements génétiques peuvent également être introduits par irradiation, comme dans le cas de la technique classique de l’insecte stérile (TIS), ou par l’infection de l’organisme par un nouveau microbe, tel qu’un virus ou une bactérie. Il existe des variantes de la TIS et d’autres stratégies de biocontrôle qui impliquent le lâcher d’insectes qui ont été modifiés en laboratoire (par génie génétique) pour effectuer un changement fonctionnel. Les modifications génétiques introduites à l’aide des technologies de biologie moléculaire devraient être plus contrôlables et prévisibles que les dommages chromosomiques aléatoires causés par l’irradiation.
Les approches génétiques de biocontrôle peuvent être utiles dans un certain nombre de conditions. C’est par exemple le cas lorsque d’autres stratégies de contrôle sont ou deviennent inefficaces, comme avec le développement de la résistance aux pesticides chez les insectes ou les mauvaises herbes. Tout comme le biocontrôle classique, les stratégies de biocontrôle génétique peuvent constituer un complément efficace aux stratégies basées sur les pesticides et réduire notre dépendance à leur égard. Le biocontrôle génétique peut également être utile dans les situations où les approches chimiques conventionnelles ne peuvent pas résoudre entièrement le problème parce qu’il est difficile ou coûteux d’appliquer ces approches dans les zones où les ravageurs se reproduisent ou causent des dommages. Les organismes vivants de biocontrôle ont l’avantage d’être biologiquement enclins à rechercher le ravageur qu’ils sont censés contrôler, ce qui simplifie leur distribution. En outre, le biocontrôle génétique peut être considéré par certains comme plus respectueux de l’environnement ou plus humain que les approches chimiques.
Différents types de biocontrôle génétique ont été proposés pour être utilisés dans les domaines de la santé publique, de l’agriculture et de la conservation. En matière de santé publique, ils peuvent contribuer à prévenir la transmission de maladies infectieuses à transmission vectorielle. Dans le domaine de l’agriculture, ils peuvent contribuer à réduire les pertes de récolte causées par les insectes nuisibles. Dans le domaine de la conservation, ils ont été proposés comme méthode de lutte contre les espèces envahissantes à l’origine de la perte de biodiversité.
La plupart d’approches de biocontrôle génétique ont un objectif similaire à celui du biocontrôle classique: réduire la population d’un organisme problématique, généralement en inhibant sa capacité à se reproduire. On parle alors de « stratégies de suppression de la population ». Certaines approches de biocontrôle génétique sont actuellement développées et visent à modifier l’organisme nuisible de manière à réduire sa capacité à causer le problème. Cela peut se faire, par exemple, en inhibant sa capacité à transmettre un agent pathogène à l’origine d’une maladie. On parle alors de « remplacement de la population » ou de « stratégies de modification de la population ».
Il s’agit d’une forme de biocontrôle dans laquelle des variantes génétiques ou des formes génétiquement modifiées de l’espèce cible servent d’une certaine manière d’agents de contrôle, de sorte que la menace posée par l’espèce cible est réduite ou éliminée. Il peut s’agir, par exemple, d’une espèce nuisible pour l’agriculture ou d’une espèce vectrice qui transmet des maladies humaines, animales ou végétales. Le biocontrôle génétique présente l’avantage d’élargir le champ des espèces nuisibles cibles au-delà de celles pour lesquelles des agents de biocontrôle classiques sont disponibles. Pour plus d’informations : Voir aussi : The promise and challenges of genetic biocontrol for malaria elimination https://www.mdpi.com/2414-6366/8/4/201